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Namur  / Namur

Par Christian Sonon

PREMIÈRE ÉCOLE DE PILOTAGE EN BELGIQUE


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Créée à Liernu, implantée aujourd’hui sur l’aérodrome de Namur, l’école EspaceDrone a déjà formé plus de 1.300 pilotes. Mais qui sont ces merveilleux fous volants avec leur... drone de machine ?


Photographier des endroits difficilement accessibles, surveiller des sites et des zones à risques, prendre des vues originales afin de réaliser des films et documentaires, se doter de nouveaux champs de vision… Voici une dizaine d’années, les possibilités qu’offraient les drones semblaient déjà évidentes dans de nombreux domaines. Mais si on en parlait beaucoup, leur bourdonnement se faisait très discret en raison d’une législation qui battait de l’aile. Depuis l’arrêté royal d’avril 2016, qui a éclairci la situation en règlementant leur usage, les drones ont pris leur envol à un rythme soutenu cadencé par l’octroi des licences. Car si n’importe qui peut faire joujou avec un engin de quelques centaines de grammes dans son jardin, pour des drones plus lourds et plus performants il faut un permis. Et les candidats affluent. Depuis qu’il a ouvert à Liernu, en 2014, la première école de pilotage en Belgique, Renaud Fraiture a ainsi formé avec ses instructeurs plus de 1.300 pilotes. Rencontre avec le patron d’EspaceDrone, école aujourd’hui implantée à Temploux au sein de l’aérodrome de Namur.

Un mot sur les drones pour commencer…

On peut les classer en deux grandes familles : les multirotors, de forme, taille et poids très variables, qui sont propulsés par plusieurs moteurs, et les ailes volantes, qui ressemblent à de petits avions. Il y en a de toutes les tailles et de tous les prix, depuis le jouet de 100 grammes à 50 euros jusqu’aux aéronefs coûtant plusieurs dizaines de milliers d’euros, le prix variant en fonction de leurs performances et leur équipement (l’étanchéité à la pluie, la résistance au vent, la possibilité de voler de nuit, etc). Pour un drone professionnel, équipé d’un GPS et d’un giroscope, il faut compter entre 1.500 et 15.000 euros. Pour certains usages, par exemple pour les drones équipés d’une caméra, il faut une deuxième commande spécifique.

Quelle licence faut-il et comment l’obtient-on ?

Pour un vol à usage récréatif, dans son jardin ou dans un espace privé avec l’autorisation du propriétaire, aucune licence n’est requise. Mais le drone doit peser moins d’un kilo et doit voler à moins de 10 mètres de haut. Pour piloter un drone dans un but commercial, il faut suivre une formation auprès d’une école reconnue et agréée qui débouche sur l’octroi d’une licence. En fonction des spécificités de l’appareil et de l’usage que l’on veut en faire, la licence nécessaire sera de classe 1 ou de classe 2. Aujourd’hui, il y a en Belgique entre 2.000 et 2.500 pilotes détenteurs d’une licence classe 1 – la plus complète – et la moitié environ qui possède la classe 2. Il existe aussi des formations de spécialisation qui ne sont toutefois pas obligatoires : pour la thermographie (mesurage des déperditions de chaleur dans les bâtiments), la photogrammétrie (mesurage 3D dans le cadre de projets urbanistiques), la vidéo, la maintenance, le secourisme…


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La réglementation fixée par l’Arrêté royal de 2016 détermine aussi les conditions de vol…

Cette règlementation a été élaborée avec la collaboration de la DGTA, la division du transport aérien, et de Skeyes, le contrôleur aérien. Pour voler, il faut se rendre sur une plateforme internet, actuellement droneguide.be. En fonction de la zone choisie, l’utilisateur verra si les conditions de vol inhérentes à celle-ci sont compatibles avec sa licence. Il devra bien sûr les respecter. Si la zone est compliquée, par exemple parce qu’elle est proche de sites interdits de survol, les détenteurs d’une licence de classe 1 pourront demander une dérogation laquelle sera examinée et accordée ou non. Par mesure de sécurité, les classes 1 doivent prévenir les contrôleurs quand ils prennent leur envol.

Et la nouvelle loi européenne ?

Elle est attendue pour janvier 2021. Le système va changer complètement. Une nouvelle carte aéronautique a été dessinée pour les drones et chaque état membre va devoir créer des zones open – à faibles risques au sol et dans l’air – et des zones spécifiques – risques accrus –, en collaboration avec les bourgmestres, la police, les militaires, les instances dirigeant l’espace aérien, les zones naturelles, les prisons, les centrales nucléaires… Les compétences exigées seront proportionnelles aux risques. Cette loi aura pour but d’uniformiser le cadre et de libéraliser le système afin de favoriser le business au sein de l’Union européenne. Si la classification sera très compliquée, une fois en possession du permis européen, l’utilisateur verra sa vie simplifiée. A EspaceDrone, tous les cours ont déjà été reconstruits en fonction de cette nouvelle loi.

Vous dites que vous avez déjà formé
1.300 élèves à EspaceDrone. Qui sont-ils ?

Environ 55 % de nos clients sont de toutes grosses sociétés comme Infrabel, RTL-TVI, RTBF, Greenpeace, ainsi que les services du cadastre ou encore Elia, qui utilise des drones pour vérifier l’état des pylônes électriques. Entre 40 et 45 % sont des petites PME et des indépendants qui se dotent d’un drone dans leur cadre de leur activité professionnelle. Par exemple des installateurs de panneaux photovoltaïques soucieux de vérifier l’état des cellules, des agriculteurs, des géomètres, des architectes, des agences immobilières qui utilisent un drone pour contrôler l’état des bâtiments… Certains s’en servent aussi pour organiser des événements à l’attention des entreprises ou des familles. Enfin, 2 % sont des particuliers pour lesquels les drones sont une passion. Ils pourraient se rendre dans des clubs de modélisme, mais leur espace serait alors plus cloisonné. Tous ces élèves apprennent avec nos drones à double commande, puis, quand ils ont obtenu leur licence, nous les aidons à choisir le produit qui conviendra le mieux à l’usage qu’ils veulent en faire. Un drone d’apprentissage ne sera évidemment pas le même qu’un drone servant à détecter des fissures…

« Environ 55% de nos clients sont de toutes grosses sociétés comme Infrabel, RTL-TVI, RTBF, Greenpeace, ainsi que les services du cadastre ou encore Elia qui utilise des drones pour vérifier l’état des pylônes électriques. »


Qu’en est-il du transport de marchandises ?

En Belgique, le fret est toujours interdit, sauf pour les détenteurs d’une licence de classe 1 moyennant une dérogation payante. L’utilisateur doit justifier sa demande et faire en sorte que les risques soient minimisés. C’est ainsi qu’il est déjà arrivé que des services de santé ou de secours transportent du matériel comme du sang, des médicaments, des défibrillateurs ou encore des bouées destinées à être larguées en mer. Dans ces cas, cela se justifie parce qu’il s’agit de sauver des vies. En revanche, compte tenu de la densité des aéroports civils et militaires en Belgique, il serait absurde de vouloir réorganiser le trafic aérien afin de faire passer des paires de chaussures ou des pizzas au dessus de la tête des gens. A cela s’ajoute le problème du largage. Avec un parachute, un filet ?…

Aux Etats-Unis, Wing, la filiale d’Alphabet (Google), a obtenu l’autorisation de déployer sa flotte de drones livreurs en Virginie en association avec FedEx. UPS, l’entreprise postale nord-américaine, a également reçu le feu vert, tandis qu’Amazon et Uber sont impatients d’utiliser leurs drones pour des livraisons très spécifiques. Un service qui aurait été le bienvenu pendant le confinement…

Ces annonces sont souvent des buzz, mais il est vrai que, dans de nombreux pays, les essais se multiplient et les demandes d’autorisation affluent. En Belgique, il est possible de créer des bulles pour faire ce genre d’essai. Je suis moi-même devenu « provider » chez Skeyes. J’ai obtenu l’autorisation de créer, à Liernu, une bulle privatisée de 4 kilomètres de diamètre et de 1.500 pieds de haut. Quand je reçois l’autorisation de l’activer, plus personne (avions, hélicos, ULM…) ne peut y entrer. Je peux ainsi utiliser cette zone pour faire voler des drones hors cadre légal, par exemple pour effectuer des vols de nuit ou à une altitude trois fois supérieure et sur des distances plus longues. Je peux également y faire des essais : pour le transport et le largage d’objets, la pulvérisation, le remorquage…


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Faux-bourdon
« Drone » vient d’un mot anglais signifiant faux-bourdon, surnom donné, dans les années 1930, par l’artillerie anglaise, à un avion cible utilisé pour l’entraînement ayant un vol lent et bruyant ressemblant à celui du bourdon.


Vous organisez également des Drone Days pour les professionnels ?

La sixième édition devrait avoir lieu le 22 octobre à Tour & Taxis. Elle aura pour thèmes la législation professionnelle et la sécurité, domaine en pleine évolution. Je suis moi-même en train de me focaliser dans la sécurité et l’inspection. J’ai signé un partenariat avec Engie et nous sommes en train de fabriquer un drone autonome doté de capteurs spécifiques de 60 millions de pixels qui peut faire l’inspection des palmes d’éoliennes afin d’y détecter d’éventuelles microfissures…

« Compte tenu de la densité des aéroports civils et militaires en Belgique, il serait absurde de vouloir réorganiser le trafic aérien afin de faire passer des paires de chaussures ou des pizzas au dessus de la tête des gens. »


www.espacedrone.be

 

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