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© Domaine des Grottes de Han

Han, plus

  • Patrimoine
  • / Face cachée
Namur  / Han-Sur-Lesse

Par Stéphane Renard

Victor Hugo, George Sand et moi et moi et moi. Et vous aussi, comme des centaines de milliers d’écoliers, vous avez visité ces Grottes qui, en 2012, ne seront plus jamais comme avant. Vraiment vrai !

Les Grottes de Han appartiennent à ce patrimoine que l’on a tous côtoyé un jour où l’autre, avant de les ranger dans une armoire à souvenirs, agréables mais un peu poussiéreux. Une image que compte bien bouleverser Brigitte Malou, administratrice déléguée du Domaine de Han depuis janvier 2011. Au vu de son parcours professionnel, on ne peut que prédire aux grottes une nouvelle jeunesse.

Avocate, dans les années 1980, au sein d’un important cabinet bruxellois, cette spécialiste du droit des sociétés décide un jour de passer « de l’autre côté de la barrière. Je voulais vraiment mettre les deux pieds dans l’entreprise », assène-t-elle avec cette énergie qui ne semble jamais la quitter. La voilà donc, de 1990 à 1994, secrétaire générale d’Eternit, où elle aura dans ses attributions la responsabilité pour l’environnement. « Années passionnantes, se souvient-elle. L’objectif était de se repositionner avec une vision d’excellence. » À la fin de sa mission, elle s’offre une année d’études en économie et en finance « pour pouvoir entrer toujours plus au coeur de l’entreprise ». La suite de sa carrière est faite de missions successives de nature financière. Elle passe ensuite au groupe d’agro-ingénierie Desmet, où elle sera directeur d’exécution de projets. Pas de quoi atterrir à Han-sur-Lesse…

Lointaine descendante

Sauf que… Il est une ligne sur son CV qui va lui jouer un tour inattendu. Brigitte Malou est en effet une lointaine descendante du baron Edouard de Spandl, qui acheta le domaine en 1856. À l’heure actuelle, les actionnaires du Domaine de Han S.A., société privée, sont encore et toujours issus des branches fondées par les cinq filles du fondateur ! Brigitte Malou siège depuis une bonne dizaine d’années au conseil d’administration des Grottes. En 2011, pressée par le conseil, elle accepte de reprendre les rênes de l’entreprise. Le défi n’est pas pour déplaire à cette femme qui « aime l’opérationnel ». Car les Grottes doivent affronter une double réalité : la baisse de la fréquentation (les 400 000 visiteurs des bonnes années ne sont plus que 265 000 en 2011) et des frais de gestion très lourds pour une PME.

Quinze mois après avoir accepté le poste, l’administratrice déléguée esquisse un premier bilan. « C’est un projet d’entreprise extraordinaire, avec une équipe extrêmement motivée et attachée au Domaine. Après trois années en perte, 2011 aura dégagé un petit bénéfice au prix de restrictions budgétaires. Mais ce premier boni nous permet déjà de lancer des projets qui s’inscrivent dans une rénovation profonde du Domaine. » WAW vous en offre les grandes lignes en avant-première.

Pour redynamiser l’image et la gestion des Grottes de Han, faut-il faire table rase du passé ? Non, pas du tout. J’ai très vite eu le désir de m’inspirer de ce qui animait Édouard de Spandl. Pourquoi a-t-il acheté le domaine ?
Parce que, quand il a vu la beauté du site, il s’est dit « WAW ! » (rires) Aujourd’hui, je veux que chaque visiteur éprouve la même chose ! Je veux renforcer les trois dimensions qui étaient chères à Édouard : la préservation, la connaissance scientifique et l’accès au plus grand nombre. Commençons par la préservation. La Grotte de Han est un patrimoine naturel et archéologique exceptionnel. C’est la seule grotte d’Europe de l’Ouest où une rivière d’une dimension aussi imposante que celle de la Lesse s’engouffre entièrement sous un massif pour en ressortir de l’autre côté. Les réseaux connus font 14 km de long, même si l’on n’en visite que 2. Les concrétions sont extrêmement belles et il y a des salles immenses. Celle du Dôme fait 145 mètres de bas en haut !

« J’ai très vite eu le désir de m’inspirer de ce qui animait Édouard de Spandl. Pourquoi a-t-il acheté le domaine ? Parce que, quand il a vu la beauté du site, il s’est dit ‘WAW’ ! »


Mais c’est aussi un patrimoine archéologique exceptionnel. C’est un site préhistorique unique en Europe. Il a été probablement un lieu de culte, accueillant des populations venues de très loin. On a trouvé dans l’eau toute une série d’objets très anciens qui y ont été probablement jetés lors de cérémonies rituelles. Certes, le domaine est privé, mais nous avons une responsabilité collective pour rendre accessible ce patrimoine aux générations futures.

Votre deuxième axe est scientifique. C’est un volet souvent méconnu du public…
Nous avons toujours travaillé avec les scientifiques, mais je veux encore davantage formaliser cette collaboration. Nous ne pouvons pas être les seuls à prendre des décisions face à un tel patrimoine. Il y a d’ailleurs une présence scientifique constante à Han, extrêmement pluridisciplinaire.

Quelques exemples de collaboration ?
Le Pr Yves Quinif et son équipe de l’université de Mons travaillent sur la géologie et la formation des grottes, et sur la paléoclimatologie en collaboration avec Sophie Verheyden (actuellement à l’Institut des Sciences Naturelles). Une grotte, c’est la mémoire du climat. On l’étudie par des carottages dans les stalagmites.

Le Pr Vincent Hallet et son équipe de l ’université de Namur mènent des recherches sur l’hydrogéologie. Ils étudient la rivière et les effets de l’eau sur les grottes. Le biologiste Guy Deflandre étudie les chauves-souris des grottes de Han. Il vient d’ailleurs d’en publier un superbe livre de photos.

Quant à la collection d’objets trouvés lors des fouilles archéologiques dans la grotte, tout à fait unique en Europe, elle fait l’objet de nombreuses études et publications, particulièrement par le Centre de Recherches Archéologiques de l’ULB, sous l’impulsion du Pr Eugène Warmenbol.

Enfin, plusieurs clubs de spéléologie continuent régulièrement leurs recherches dans les grottes, qui continuent à nous révéler peu à peu leurs mystères.

Cet intérêt scientifique dépasse-t-il le cadre des grottes ?
En effet, il y a 40 ans, dans un souci de protection du cadre naturel exceptionnel entourant les grottes, le Domaine a décidé de créer sur le massif de Boine, qui surplombe la grotte, et dans la chavée (vallée asséchée) de la Lesse une réserve d’animaux sauvages de nos régions. Mais la Réserve participe également à notre mission de préservation de la nature. Nous faisons partie du Réseau Nature de Natagora. Dans ce cadre, nous restaurons entre autres plusieurs zones de pelouses calcaires, ce qui permet le développement d’une flore très particulière et très rare en nos régions.

« Il y a 40 ans, le Domaine a décidé de créer sur le massif de Boine, qui surplombe la grotte, une réserve d’animaux sauvages de nos régions. »


Nous participons également activement à de nombreux programmes européens pour les espèces en danger, sous l’égide de l’EAZA (Association européenne des zoos et aquariums). Ce type de programme a pour but d’encourager et de surveiller l’élevage d’une espèce menacée, avec pour finalité une éventuelle réintroduction dans la nature. C’est ainsi que nous avons participé à plusieurs programmes d’échange de chevaux de Prevalski, d’aurochs et particulièrement de bisons d’Europe. Il y a un siècle, la race des bisons d’Europe était quasi disparue, il n’existait plus que treize géniteurs dans les forêts de Pologne. Aujourd’hui, ils sont 3 000 dans toute l’Europe. Six sont nés chez nous ces dernières années ! Nous avons ainsi transféré cet été trois bisonnes dans un gigantesque parc naturel écossais où elles sont destinées à être remises en liberté.

Votre troisième priorité est l’élargissement du public. Han ne souffre-t-il pas d’une image un peu trop « scolaire » ?
Vous avez raison. Le premier président de l’association belge des voyages scolaires, en 1932, était d’ailleurs le président des Grottes… Pour beaucoup de gens, les grottes de Han, cela signifie voyage scolaire, point. Le problème, c’est ce point ! Il est facile de faire venir les gens une fois, plus difficile de les faire revenir… Nous n’allons certainement pas abandonner notre politique familiale et scolaire. Mais nous allons considérablement développer l‘offre (voir article « Le nouvel Han » p. 69) Pour que les visiteurs viennent et reviennent, nous devons proposer, au-delà de nos visites classiques, des expériences plus interactives, plus variées, et aussi plus authentiques. « Han, c’est la nature grandeur nature ». Le slogan du domaine met résolument l’accent sur le vrai. À l’heure où le monde virtuel s’insinue partout, l’authentique, c’est notre potentiel. Il est immense !

 

Renseignements

Le Domaine des Grottes de Han
Rue Joseph Lamotte 2
B-5580 Han-Sur-Lesse
+32 (0)84 37 72 13
info@grotte-de-han.be
www.grotte-de-han.be

 

Bio Express

1990 → Etex Group, General Secretary
1991 → Bogimac Engineering, Director
1996 → Ackermans & Van Haaren, Business Consultant for Nationale Maatschappij der Pijpleidingen
1997 → Seghers Better Technology, Director Finance
2000 → Christian Salvesen, Interim Manager, Financial Control & Customer Service, Zellik operations
2001 → Desmet Group, Business Consultant
2004 → Desmet Ballestra, Director Project Execution
2009 → Brigitte Malou BVBA / SPRL, Interim Manager
2011 → Grottes de Han et de Rochefort, Managing Director

 

Les promesses du nouvel Han

Un circuit pédestre, enfin…

À l’heure actuelle, la réserve se visite en safari-car. « Grande première » en été 2012, un premier circuit pédestre de 2 kms sur le massif de Boine, qui surplombe les grottes, permettra aux visiteurs de profiter à leur rythme de cette extraordinaire nature. « Le visiteur pourra ainsi vivre une vraie expérience multisensorielle, sans limite de temps, s’enthousiasme Brigitte Malou, administratricedéléguée du Domaine de Han. Petit à petit, les visiteurs vont revenir parce qu’ils vont découvrir à pied les différentes saisons de ce magnifique paysage de Famenne. Et ils auront le temps d’observer à leur aise les animaux. Nous développerons ensuite d’autres boucles sur le massif, des postes d’affût, voire des parcours aventure… ».

L’éclairage aux LED

L’exploitation a toujours veillé à être la plus respectueuse possible du site. Mais ce respect varie en fonction du temps. Plus question aujourd’hui de visiter avec des torches. Même l’éclairage électrique, qui a succédé à l’éclairage au gaz, peut provoquer la poussée de végétation autour des lampes, ce qui implique de fréquents nettoyages. Il est prévu de passer à l’éclairage par LED (Light Emitting Diode). Beaucoup plus respectueux de l’écologie car dégageant moins de chaleur, il donne une très belle lumière, qui met davantage en évidence les concrétions. D’ici deux ou trois ans, l’ensemble des salles visitées devraient être éclairées aux LED.

Réouverture de la salle des Draperies

Ce n’est pas un hasard si c’est justement celle-là qui bénéficiera en priorité de ce nouvel éclairage LED. Fermée il y a 25 ans parce qu’elle allongeait la visite et était souvent inondée, elle va renouer avec le public dès avril. Les visiteurs ne peuvent que s’en réjouir : c’est l’une des plus belles salles des grottes, et les reflets des stalactites dans la rivière sont fascinants.

Mise en valeur de la Plaine au coeur du Domaine

C’est l’endroit où s’arrêtent les visiteurs après leur visite de la Grotte ou de la Réserve, pour reprendre leur souffle, se restaurer, se récréer. Le lieu est magnifique et accueille deux restaurants, dont un Tea-Room haut de gamme, et une grande plaine de jeux. Cet été, avec la redynamisation de la mini-ferme, et des animations conviviales pour les petits, il fera bon vivre dans la Plaine.

Ouvrir le Domaine aux entreprises et associations…

De grandes sociétés et associations font régulièrement appel au Domaine pour l’organisation de leurs événements de relations publiques ou d’« incentive » pour le personnel. Les privés peuvent aussi s’offrir un extra : la Salle d’Armes au coeur de la Grotte a accueilli deux mariages en 2011. Et il devrait y en avoir d’autres… Les amoureux d’expérience nature pourront également envisager de passer une nuit dans la Cabane des Trappeurs, à côté de la tanière aux ours. Dormir en pleine réserve naturelle…

Un « Pass Han » ouvert sur le village

Les Grottes de Han ne sont pas qu’une grotte et une réserve. Elles forment aussi un vaste domaine, qui se niche dans un superbe village. Ce village compte également la Maison de la vie paysanne, un petit bijou, qui aligne une cinquantaine de scénettes représentant des métiers 1900. Un partenariat conclu avec ce musée permet désormais au visiteur muni d’un « Pass-Han », un billet unique, d’avoir accès à la fois à la grotte, à la réserve, à la plaine et à la Maison de la Vie Paysanne. « Han n’est pas un site fermé, ni une attraction emmurée, insiste Brigitte Malou. C’est tout un village qui s’ouvre au visiteur, et c’est unique. »

Des visites spéciales

Il existe déjà depuis de nombreuses années des visites à thème autour du « brâme du cerf » ou d’Halloween, ou les visites de la Grotte à l’Han-cienne, qui rencontrent un franc succès. D’autres visites spéciales, de la Grotte ou de la Réserve, vont être offertes cette saison. Elles feront appel à tous les sens : visites de la Grotte en musique, en chant ou en conte, visites dans les traces des découvreurs, safaris photos, balades gourmandes et autres visites à thème dans la Réserve… Beaucoup de ces concepts ont été testés l’été 2011, et ils ont visiblement séduit.

PMR bienvenus

À saluer : les gestionnaires du site développent, depuis trois ans, une politique en faveur des personnes à mobilité réduite. À l’heure actuelle, il est possible de visiter la partie centrale des grottes en fauteuil roulant. De même, il existe une remorque spéciale pour les Safari car permettant aux personnes en chaise l’accès à la visite de la Réserve. Quant à la plaine de jeux pour enfants, elle est désormais équipée PMR elle aussi…

Vestiges préhistoriques

Les amoureux de vestiges préhistoriques peuvent admirer sur place une exposition spéciale « Préhisto-Han », qui est une délocalisation de l’exposition montée par le Pr Quinif (Université de Mons). Dans le même esprit, à la sortie de la grotte où ont été trouvés nombre d’objets de culte préhistoriques, la paroi servira bientôt d’écran géant pour la projection de dessins de Benoît Clarys, représentant nos très lointains ancêtres occupants des lieux. Une invitation imagée à nous replonger dans nos origines.

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