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Par Laurence Cordonnier
La Brasserie Fred s’adresse aux gourmands. Les produits phares de la région y sont déclinés tantôt de façon pointue, tantôt de façon canaille. Dans les deux cas, la promesse est tenue et, petit plus, soulignée par un Bib gourmand au Guide Michelin.
Parler de la Brasserie Fred, c’est tout d’abord évoquer le Sanglier des Ardennes, cet hôtel et restaurant gastronomique qui surpasse peut-être en renommée le passé historique de la jolie cité médiévale de Durbuy ou son impressionnant anticlinal. On pourrait confondre les deux établissements tant ils sont entremêlés : même bâtiment, mêmes cuisines, même propriétaire et chef, Frédéric Cardinael, figure bien connue de la plus petite ville du monde. Les différences résident dans l’expérience proposée, mais aussi… dans des portes d’entrée distinctes.
Le plaisir avant tout
Lorsque vous franchissez le seuil de la brasserie, vous savez immédiatement qu’ici, le plaisir, on ne le boude pas ! Le buffet de pâtisseries vous fait de l’œil et vous réalisez déjà la difficulté à poser un choix ferme et définitif pour le dessert. Le cadre aussi invite à la rêverie. Dans une déco chaleureusement vache – des abat-jour aux banquettes –, la pierre et le bois sont à l’honneur. Par la fenêtre, la vue s’ouvre sur un anticlinal surplombé par le château médiéval de Durbuy. On vous propose en apéro une coupe de Cerdon, vin mousseux rosé produit entre Lyon et Genève, accompagné par du pop-corn maison à la muscade ou au curry. Le ton est donné, vos papilles sont en éveil.
Quand l’Ourthe et ses méandres se perdent en forêt ardennaise, cela donne une carte profondément ancrée dans le terroir. Le gibier côtoie la truite. Celle-ci est amoureuse du beurre d’orties tandis que la bière Durboyse se joue du cochon. La grande spécialité de la maison, s’il fallait n’en retenir qu’une seule, serait sans conteste l’écrevisse : en guacamole, à l’échalote, en salade César ou tout simplement froide, servie avec une généreuse mayonnaise. Vous l’avez compris, nous sommes ici attablés autour de ce que l’Ardenne authentique et sauvage a de meilleur à offrir. Et vous pouvez compter sur Fred pour la zester d’inventivité et de modernité.
Une autre curiosité de la carte est la déclinaison de cocottes, de la queue de bœuf à l’épaule d’agneau. Et lorsqu’il vous arrive de vous brûler la langue en vous ruant, avec gourmandise, sur votre cocotte de joue de porc, le personnel vous apporte une petite assiette pour que le plat refroidisse plus vite. Oui, c’est très bon. Oui, vous étiez pressé de dévorer ce festin aromatique. Mais non, personne ne vous juge. Dans ce genre d’établissement, la gourmandise est un compliment ! La gastronomie se la joue décontractée. Décontractée certes, mais intransigeante sur le look des assiettes et sur la qualité des produits ! Les asperges ? Seulement en saison ! Les viandes ? Issues d’une coopérative d’éleveurs. Les fromages ? De la Ferme André du village voisin, pardi ! Mais l’ancrage local ne se retrouve pas seulement dans l’assiette. Les tableaux du peintre Jacques V. Lemaire, originaire de la vallée de l’Ourthe, ornent les murs.
La cuisine selon Fred
La grand-mère de Frédéric Cardinael a créé l’entreprise en 1946. Depuis 2000, Frédéric et sa vision contemporaine sont aux commandes et aux fourneaux. Après des études en hôtellerie à Libramont, le chef fait ses armes auprès des plus grands, voguant entre les deux et les trois étoiles de Paris, Nice ou Londres. Et s’il est un principe auquel il croit dur comme fer, c’est que le terroir donne tout son sens à la cuisine. De la même manière qu’il prend plaisir à manger une tomate crevettes à la côte ou un boulet sauce lapin à Liège, le chef capitalise chez lui sur les richesses de la rivière toute proche et celles des forêts avoisinantes. Pourtant, lorsqu’il évoque l’évolution de son secteur, il est convaincu que le végétal prendra le pas sur l’animal. La viande deviendra garniture, habillant avec élégance la nouvelle star de l’assiette, le légume. Mais que les carnivores se rassurent ! Aujourd’hui, sa carte met à l’honneur cochons et sangliers, en terrine, en jambons, en côtes à l’os et même en cocottes.
À l’affût des tendances, l’entrepreneur a encore quelques projets sur le feu qui devraient voir le jour cet été. Ceux-ci lui permettront de se positionner sur un nouveau créneau de la restauration à Durbuy. Mais le mot d’ordre actuel à ce sujet est « motus et bouche cousue »…
Renseignements :
À VOIR, À FAIRE
Riveo et la pêche aux écrevisses
L’Ourthe, comme bien des cours d’eau, regorge de trésors cachés. On imagine aisément la faune qui pépie, coasse ou ronge et la flore qui creuse ou pousse allègrement sur ses berges. Il est plus rare de plonger la tête la première pour découvrir la vie qui grouille a côté des grenouilles. Riveo est le centre d’interprétation de la rivière et c’est exactement ce qu’il propose grâce à un bras de rivière reconstitué de 12 m de long, 16 aquariums et 1500 m2 de jardins thématiques. Jusqu’en 2017, son exposition « Nom d’une pince » lève le voile sur l’écrevisse, crustacé aussi méconnu que fascinant. Et pour les audacieux, une initiation à leur pêche est organisée en été.