- Dossier
Par Joéllie Sprumont
C’est lors d’une nuit d’insomnie que Caroline Marcour, responsable administrative et financière, a eu l’idée de créer cette coopérative de consommateurs. Elle est partie du constat qu’il était difficile d’avoir le temps de faire ses courses en grandes surfaces, à la ferme ou dans un Groupe d’Achats Communs. « Je travaillais chez Exposant D, une association de développement durable. Me rendant au travail en train, je revenais vers 18h à Liège et je faisais mes courses au supermarché. Je me suis dit que ce n’était pas normal ! »
Dorénavant, c’est confortablement assise dans son canapé avec l’ordinateur sur les genoux que le client peut faire ses courses. Une commande sur le site e-commerce de La Coopérative Ardente permet de gagner de précieuses minutes. « On ne craque plus sur les achats impulsifs mis en avant à la caisse. De plus, il y a moins de déchets, j’ai mon frigo sous la main donc je peux vérifier ce que j’ai. Les légumes en circuit court se conservent plus longtemps. » Les épinards, par exemple, récoltés en début de semaine et livrés le mercredi, sont bons pendant dix jours !
Dans un entrepôt à Saint-Nicolas, des paniers au sol remplis de produits bios, locaux, équitables. Ils sont prêts à partir en point-relais au sein de la Cité ardente. Parmi eux, des fruits et légumes de saison, des produits emballés, de la viande et des produits ménagers. À La Coopérative Ardente, l’accent est mis sur la variété. Au total, 1500 produits différents.
Devenir acteur de sa consommation
La Coopérative Ardente a pour ambition de recréer du lien social en même temps qu’elle opère au niveau des enjeux environnementaux et économiques. Son but est aussi de faire vivre la filière en collaborant avec des producteurs locaux. C’est donc sous forme de société coopérative à finalité sociale que Caroline Marcour a décidé de transformer son rêve en réalité. Ainsi, Miguel, le manutentionneur-livreur, était sans travail depuis longtemps.
Grâce à un coach et à la bourse « ImpulCera* » (étude de faisabilité et lancement), Caroline Marcour a pu concrétiser son projet. Sa collègue, Pauline Leboutte, ancienne formatrice dans une régie de quartier, était ravie de la rejoindre dans cette aventure. Après dix-huit mois d’étude et de business plan, la société a été fondée en octobre 2012. « Il nous a fallu six mois de plus pour trouver un local, des capitaux, des employés et des fournisseurs. Nous avons commencé les livraisons dès avril 2013. »
À l’origine, ils étaient 26 fondateurs avec un capital de 20 000 €. Aujourd’hui, ils sont 270 à participer à ce projet d’une valeur de 70 000 €. En investissant un minimum de 100 €, ils détiennent une part dans la société. Ils bénéficient d’une réduction de 3 € sur la livraison. Ils peuvent aussi assister aux assemblées générales et disposent d’un droit de vote. La transparence est un des fers de lance de la coopérative. « Faire des bénéfices n’est pas une fin en soi, mais s’il y en a, ils seront investis dans la société. Contrairement aux grandes surfaces où on ignore où va l’argent. Il y a aussi une limitation du droit de vote pour donner la parole à tout le monde. »
L’ambition de changer les habitudes
Caroline Marcour l’avoue : il n’est pas évident de se lancer, surtout dans la vente de produits alimentaires. C’est même plus difficile qu’elle ne le pensait. « Il faut trouver des clients, et puis il s’agit de changer les habitudes de consommation. Je pense que les gens ne sont pas tout à fait prêts. Même si ceux qui passent par la coopérative trouvent le système vraiment chouette. » Il n’est effectivement pas possible de manger des tomates en hiver. À la question de savoir si on finit par se lasser, Caroline Marcour répond. « Pas du tout, on s’adapte. On découvre des aliments peu connus comme des panais ou des betteraves. On donne des idées, des recettes sur le site. »
Avec La Coopérative Ardente, Caroline Marcour confie son idéal d’un jour supplanter les supermarchés. Mais pour le moment, l’objectif est de pérenniser l’entreprise et de sauvegarder les trois emplois occupés. Petit à petit, elle commence à démarcher aussi les entreprises afin de permettre aux employés de recevoir leurs colis sur place. La Coopérative restera-t-elle ardente ? « Nous allons d’abord consolider le centre-ville avec des apéros en points relais. Et peut-être plus tard, s’étendre aux communes périphériques. Nous restons avant tout une entreprise familiale, nous connaissons tout le monde. »