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Le baptême du feu des Britanniques

  • Dossier
Hainaut  / Mons

Par Christian Sonon

Si bien peu de Belges savaient, avant ces commémorations, que la Cité du Doudou avait fait l’objet de combats sanglants en 1914, les Britanniques, eux, n’ont pas oublié le sang versé. La Ville de Mons et le cimetière de Saint- Symphorien figurent en bonne place dans leurs souvenirs.

Le 21 août 1914, le jeune John Parr, qui avait déclaré avoir 20 ans mais n’en avait que 16, tombait en terre montoise lors d’une reconnaissance en vélo près d’Obourg et devenait ainsi le premier soldat britannique à trouver la mort lors de la Grande Guerre. Le 11 novembre 1918, à 9h30, George Ellison clôturait cette longue liste de victimes britanniques en étant abattu presque au même endroit. The First and The Last. Mais aussi The Beginning and The End, puisque, pour les troupes du Commonwealth venues à notre rescousse en août 1914, la guerre s’est terminée exactement là où elle avait commencé. C’est-à-dire à Mons, entre la Haine et la Trouille, au milieu des terrils, le long du canal et dans le dédale des ruelles et maisons noircies par la suie.

C’est en 1914 que le nom de cette ville s’est surtout inscrit dans l’Histoire. À l’automne 1918, la messe était dite : quand la 3e division canadienne, combattant au sein de l’armée britannique, délivra la ville dans la nuit du 10 au 11 novembre, les troupes allemandes en repli ne livraient plus que des combats d’arrière-garde. Les 22 et 23 août 1914, en revanche, les premiers affrontements entre les troupes britanniques et allemandes s’avérèrent beaucoup plus sanglants.

Des boucliers humains

La bataille de Mons clôt la liste des combats qui firent rage le long de la frontière française, depuis la Province de Luxembourg jusque dans le Hainaut. Elle opposa le corps expéditionnaire britannique, commandé par le général French (30 000 hommes), à la 1re armée allemande du général Alexander von Kluck (90 000 hommes) qui, suivant le plan Schlieffen, avait pour mission de traverser la Belgique par l’ouest afin d’effectuer un large mouvement en courbe vers Paris. Les Britanniques tentèrent de contenir la poussée allemande en se retranchant, le 22, le long du canal Mons-Condé. Les armées s’affrontèrent d’abord au nord de la ville, principalement à Casteau, Obourg et Nimy, où les quatre ponts surplombant le canal fut l’enjeu de violents combats. Malgré son infériorité numérique, le corps expéditionnaire britannique résista aux assauts allemands et leur infligea de lourdes pertes. Le 23, cependant, devant la pression ennemie et afin de ne pas se faire encercler, les forces alliées furent contraintes de se replier vers le sud. Des échanges nourris eurent encore lieu au carrefour de la Bascule et au Bois-là-Haut, où seraient apparus les fameux anges armés qui vinrent aider les Britanniques à s’échapper. Le 24, les combats se poursuivirent vers le sud et l’ouest, du côté de Saint-Ghislain, Frameries, Audregnies… « C’est à Obourg et à Nimy que les combats furent les plus virulents, explique Corentin Rousman, historien et responsable des archives de la ville de Mons. À Nimy, les Allemands ne se contentèrent pas de pilonner le village. Une fois sur place, ils brûlèrent des maisons et massacrèrent plusieurs habitants. Le centre de Mons, par contre, ne connut pas de gros dégâts. En revanche, les Allemands y pénétrèrent de bien mémorable façon puisqu’ils obligèrent les habitants à sortir de leur maison afin de les utiliser comme boucliers humains. »

DEUX ÉTOILES AU MICHELIN POUR LE CIMETIÈRE DE SAINT-SYMPHORIEN

Situé à 2 kilomètres au sud-est de Mons, près de la route menant à Binche, le cimetière militaire de Saint-Symphorien est l’un des plus beaux de Belgique et un lieu incontournable du tourisme de mémoire. Là, dans ce parc vallonné et parsemé d’arbres, au milieu de pelouses soigneusement entretenues par la Commonwealth War Graves Commission, reposent côte à côte les dépouilles de 284 Allemands et 229 ressortissants britanniques. La plupart tombés durant la bataille de Mons en août 1914, d’autres lors de la libération de la ville en 1918. Le cimetière, que le guide Michelin gratifie de deux étoiles, héberge également les tombes de John Parrr et de George Ellison, lesquels se font face sur la même pelouse. Mais également celles du lieutenant J. Dease dont la bravoure à défendre jusqu’à la mort le pont-rail de Nimy lui valut de recevoir la première Victoria Cross de la Grande Guerre. Ainsi que celle du Canadien George Lawrence Price qui fut le dernier soldat des armées du Commonwealth à trouver la mort, le 11 novembre 1918 à… 10h58 !

Comment des militaires des deux camps se sont-ils ainsi retrouvés côte à côte pour l’éternité ? La construction de ce lieu symbolique est née de la volonté des Allemands d’ensevelir leurs morts en 1916. Ayant jeté leur dévolu sur un terrain appartenant au naturaliste Jean Houzeau de Lehaie, celui-ci proposa de concéder gracieusement l’usage de sa parcelle à condition qu’y soient rassemblés tous les combattants, quelle que soit leur nationalité. En temps de guerre, c’était là un puissant symbole. L’émotion que le visiteur ressent aujourd’hui n’en est que plus forte. Preuve encore de l’importance de ce lieu pour les Britanniques, le prince William et la princesse Kate, héritiers du trône d’Angleterre, étaient présents, le 4 août dernier, au cimetière de Saint-Symphorien, afin de participer à la cérémonie d’hommage aux soldats de la Première Guerre mondiale.

UN PARCOURS DE MÉMOIRE JUSQUE LE CATEAU ET CAMBRAI

Afin de permettre aux visiteurs de découvrir les monuments, cimetières et lieux de bataille emblématiques qui parsèment la région, la Ville de Mons propose depuis ce mois d’août un tout nouveau parcours de mémoire issu d’un partenariat transfrontalier financé par l’Union européenne. Intitulé « La Grande Guerre. Corps, armes et paix », ce parcours a pour but de valoriser la retraite britannique d’août 1914. « Il s’agit d’un projet Interreg qui intègre l’ensemble des sites et monuments autour de Mons, ainsi qu’à Le Cateau et à Cambrai, explique Guillaume Blondeau, le conservateur du pôle muséal. Six circuits ont ainsi été défi nis, dont trois proposés par notre ville. Le premier a pour thème la Légende des Anges de Mons, le deuxième, The first and The Last, suit les faits militaires survenus en 1914 et 1918, et le troisième, En temps de guerre, est un parcours civil à travers la vie des Montois. Ces circuits, ainsi que ceux qui ont pour cadre le Cateau-Cambrésis, peuvent être suivis à l’aide de brochures, mais également via des smartphones en téléchargeant la même application à partir de plusieurs adresses. À chaque point d’arrêt, un ange revisite en le commentant le site ou le monument emblématique rencontré. »

mons.cirkwi.com

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