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Par Jean Fauxbert
La renaissance des palaces mosans
Lorsqu’un collectif d’investisseurs belges décide de «casser la (grosse) tirelire» dans le pays, le résultat s’appelle « Les Sorbiers », un domaine historique de 17 hectares, à Hastière. Cette ancienne propriété de la famille Boël accueille un hôtel-restaurant au charme infini et aux facettes multiples.
Tout commence il y a 26 ans. Un groupe d’amis emmené par le producteur de cinéma bruxellois Jean-Philippe Laroche (Arrêtez-moi, avec Sophie Marceau et Miou-Miou en 2013, ou Avant l’aube, avec le regretté Jean-Pierre Bacri en 2011…) a ses habitudes de villégiature au Crotoy, en Baie de Somme. Entre eux, ils s’appellent « les Récrés » et ils « tombent en amour » – comme on dit au Québec – devant un ancien hôtel aux couleurs chatoyantes. Leur aventure commencera par l’acquisition et l’aménagement de l’hôtel « Les Tourelles ». Trois ans plus tard, alors que le groupe s’est élargi, un nouveau coup de cœur est enregistré, à la montagne cette fois. Ils rachètent une ancienne station de téléférique à Champéry (Suisse) pour y aménager un autre hôtel, joliment appelé « Plein Ciel ».
En face de l’île d’Androssart
Vingt ans plus tard, le collectif d’investisseurs s’est encore enrichi de nombreux partenaires : les « Récrés » comptent plus d’une centaine de membres et un administrateur-délégué, Bernard Richelle, par ailleurs président Citydev.Brussels (ex Société de Développement pour la Région de Bruxelles-Capitale). Toujours en recherche de nouvelles aventures, ils sillonnent notamment la Wallonie. Cette fois encore, un coup de cœur les cueille dans une des plus belles parties de la Meuse, à Hastière, où ils découvrent et rachètent « Les Sorbiers », un domaine de dix-sept hectares ayant appartenu à la famille Boël. Un site exceptionnel baigné par un bras de Meuse et protégé par l’île d’Androssart.
Pour rappel, dans les années 1900, la Meuse qui serpentait entre Dinant et Givet était un lieu de villégiature privilégié, bordé par de nombreux hôtels appelés alors les « palaces mosans ». Hastière, Heer, Waulsort… étaient connus et fréquentés par de riches touristes et des personnalités telles que Emile Verhaeren, Félicien Rops, Henri Conscience, Adolphe et Louis Delhaize, ou encore Paul-Henri Spaak.
Un siècle plus tard, ces magnifiques bords de Meuse entre Wallonie et France retrouvent une partie de leur lustre d’antan grâce à la création de circuits touristiques et l’aménagement de gîtes et de « bed & breakfast ». Mais avec « Les Sorbiers », la notion de palace mosan (re) prend tout son sens. « L’investissement total pour les aménagements s’élève entre deux et trois millions d’euros, mais nous avons voulu que l’ensemble soit accessible à tous, précise Maxime Ramé, le directeur du site. C’est peut-être un palace compte tenu de son cadre et de son aménagement, mais pas en raison des prix que nous pratiquons. Le projet des « Sorbiers » a reposé et repose encore sur le thème de la nature offerte à tous. »
Hôtel, ruches et potager
Et si la nature est généreuse sur les dix-sept hectares des Sorbiers, sa mise en valeur est aussi exceptionnelle que variée. Les chambres lumineuses portent les noms fleuris de Roseau, Rives, Aulne ou Pigamon ; des séminaires peuvent être organisés dans une superbe orangerie en bord du fleuve ; plus loin, des ruches voisinent avec les parterres colorés de fleurs mellifères qui offriront le nectar jaune aux enfants qui viendront en classes vertes. Et puis, il y a ce magnifique potager cher au chef du restaurant et qui s’appelle, en toute simplicité, « En face de l’île ».
Le chef, aux Sorbiers, c’est Nicolas Valanchon, un grand gaillard au CV fourni et qui paraît vivre un rêve lorsqu’il parle des Sorbiers : « C’est vrai que j’ai eu un coup de cœur lorsque j’ai vu l’annonce sur un site professionnel, commente le chef français. J’étais à Singapour mais, depuis longtemps, j’avais envie de pouvoir cultiver moi-même et travailler des produits naturels. C’est peut-être l’héritage de mon passage chez Jean-Michel Lorain, le chef doublement étoilé en Bourgogne. Et, ici, tout ce qui est miel, légumes, fruits ou aromates vient des Sorbiers. Et tout ce dont on ne peut disposer sur le site nous est fourni par des producteurs locaux. Circuits courts toujours ! »
« Les Sorbiers » est aujourd’hui l’un des deux établissements belges à disposer de l’Eco-Label européen.
C’est un label qui ne porte pas uniquement sur les équipements, mais qui repose sur le projet dans son intégralité et sur le long terme.
Un site éco-labellisé
Une vingtaine de personnes entourent Maxime Ramé et Nicolas Valanchon pour gérer le site. C’est qu’autour des dizaines de chambres du Castel, du Palladio ou des gîtes de la Maison Blanche qui permettent d’accueillir jusqu’à cent personnes, il y a les salles de réunions ou de séminaires, le potager et le rucher, la bibliothèque, la cuisine, l’organisation des loisirs… Ceux-ci vont de la balade près des rochers de Freyr et la visite du château éponyme à la pratique du VTT ou du paddle sur la Meuse, en passant par les concerts estivaux de musique. Car « les Récrés » ont nourri le projet fou – mais étudié – d’ouvrir le site à la clientèle en pleine pandémie, le 1er août dernier. « On ne s’attendait évidemment pas à devoir fermer lors du premier confinement, explique Maxime Ramé, mais le succès qu’on a enregistré durant nos premières semaines a confirmé la justesse du projet et son adéquation par rapport à la demande. Et, durant le confinement, nous avons pu peaufiner nos aménagements, mais aussi envisager d’autres projets comme un golf et/ou une piscine pour l’été prochain. »
Les responsables ont également peaufiné l’image écologique du site. Grâce, notamment, à la qualité du projet – qui inclut une chaudière bio-masse –, « Les Sorbiers » est aujourd’hui l’un des deux établissements belges à disposer de l’Eco-Label européen. « C’est un label qui ne porte pas uniquement sur les équipements, mais qui repose sur le projet dans son intégralité et sur le long terme . Il s’agit donc d’un processus évolutif. »
« C’est peut-être un palace compte tenu de son cadre et de son aménagement, mais pas en raison des prix que nous pratiquons. »
L’équipe des Sorbiers encadrée par Maxime Ramé et Nicolas Valanchon (respectivement 6e et 4e à partir de la droite).
Les Sorbiers
Rue des Sorbiers 241
B-5543 Heer
+32 (0) 82 22 20 63
www.lessorbiers.com