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Par Waw
La jeune PME de Gosselies, créée en 2009, entend révolutionner le marché des simulateurs de vol professionnels en proposant aux écoles et aux compagnies aériennes un modèle plus complet, plus moderne et surtout beaucoup moins cher.
Un outil pédagogique révolutionnaire, c’est de cette façon que Jean-Claude Streel présente le simulateur de vol de type Boeing 737 NG produit par Venyo, petite entreprise située aux abords de l’aéroport de Charleroi. Ce produit qui fait la fierté du directeur marketing de la jeune société avait reçu un accueil enthousiaste au salon du Bourget (Paris) en 2013, la référence des salons aéronautiques. Mais la création de Venyo n’était alors qu’au stade du prototype, encore un peu grossier selon ses concepteurs. Depuis quelques semaines, il s’agit désormais d’un produit commercialisable. La ligne de pré-production est mise en place et le simulateur est en cours de certification auprès de l’EASA (Agence européenne de la sécurité aérienne). Un certificat que Venyo devrait recevoir cet été. Le carnet de commande de Venyo pourra alors commencer à se remplir.
Dans peu de temps, de nombreux commandants de bord et des apprentis pilotes du monde entier seront donc formés sur un outil 100 % wallon et « de très haut niveau technologique », assure son concepteur, Fabrice Cornet. Ce dernier, informaticien de formation et lui-même pilote, s’est lancé le défi il y a cinq ans de proposer aux compagnies aériennes un simulateur plus complet, plus moderne et surtout dix fois moins cher. « Les simulateurs qui existent actuellement sont dépassés au niveau informatique. Ce sont des outils qui se basent encore sur une technologie des années 1980. Or, les avions ont beaucoup évolué. La qualité de la formation d’un pilote dépend beaucoup de l’expérience de ses instructeurs. Toutefois, un instructeur doit pouvoir utiliser les meilleurs outils pédagogiques possibles pour transférer son savoir. C’est pourquoi Venyo a conçu un simulateur de vol professionnel révolutionnaire qui reproduit des conditions de vol inégalées à ce jour », constate Fabrice Cornet.
Détrôner les Canadiens
« Le numéro un du marché, une société canadienne qui couvre environ 70 % du secteur, fournit des équipements basés sur une technologie aujourd’hui révolue, insiste Jean-Claude Streel. Au niveau informatique, au niveau visuel, ils ne sont plus vraiment à la pointe. Quant à la capacité des simulateurs actuels à déclencher des pannes, elle se limite à 200 types d’incidents, alors que, dans la réalité, un pilote peut être confronté à bien davantage de problèmes. De plus, le prix des simulateurs actuellement sur le marché oscille entre 15 et 25 millions de dollars. Et ils consomment en outre énormément d’énergie. Les coûts de formation des pilotes sont donc énormes pour les compagnies aériennes qui doivent envoyer leurs pilotes dans des centres de formation, car elles sont incapables d’acheter ces machines si onéreuses. »
Face à ce constat, Venyo veut relever le pari de faire beaucoup mieux, avec des technologies modernes. L’objectif est de proposer aux compagnies un simulateur dix fois moins cher, capable de générer bien plus que 200 pannes et que les compagnies pourraient installer chez elles, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
« Notre produit est beaucoup plus efficace au niveau pédagogique. Il est déplaçable facilement et va nettement baisser les coûts de formation. Et il consomme moins qu’un four à pizzas », se félicite Fabrice Cornet.
Cet Hennuyer a passé cinq ans à mettre au point le prototype qui a été présenté, rappelons-le, aux professionnels du Bourget en 2013. Un prototype, mobile donc, et qui fonctionne sur une prise 220 volts. C’est une première dans l’histoire de l’aéronautique qui a été accueillie avec enthousiasme au Bourget. Preuve de l’engouement suscité par Venyo, lors de ce salon, plus de 100 télévisions du monde entier se sont intéressées au projet tandis que la presse spécialisée a immédiatement été conquise par ce prototype « que le marché réclame depuis 20 ans », assure Jean-Claude Streel. Le retour du marché a effectivement été immédiat avec une forte demande.
Face à cet enthousiasme, Venyo a alors acquis la certitude de la viabilité du projet et donc entrepris les démarches pour faire certifier son produit auprès du Ministère belge des Transports et de l’EASA. Le capital de 3 millions € amenés principalement par des investisseurs privés mais aussi par la Région wallonne a été bien utilisé. Reste maintenant à produire et vendre le produit.
« Nous serons présents sur le salon de Farnborough en Angleterre au mois de juillet, non plus avec un concept mais avec une unité industrielle. Nous pourrons bientôt servir les premiers clients, se réjouit Jean-Claude Streel. Nous avons déjà deux partenaires de lancement, une école de formation et une compagnie aérienne à qui nous fournirons (gratuitement durant les trois premiers mois) nos premiers simulateurs afin de valider le produit et d’en faire une première publicité. Car si le marché est effectivement demandeur, nous n’avons encore qu’une faible notoriété. »
« Les simulateurs qui existent actuellement sont dépassés au niveau informatique. Ce sont des outils qui se basent encore sur une technologie des années 1980. Or, les avions ont beaucoup évolué. La qualité de la formation d’un pilote dépend beaucoup de l’expérience de ses instructeurs. Toutefois, un instructeur doit pouvoir utiliser les meilleurs outils pédagogiques pour transférer son savoir. »
Boeing dans le colimateur
Venyo emploie actuellement 16 personnes, principalement des ingénieurs. Cet effectif pourrait rapidement doubler. L’objectif de la société hennuyère est de fabriquer 30 simulateurs dans les deux ans à venir, et une centaine d’ici cinq ans. Les premiers simulateurs sont basés sur le Boeing 737 New Generation (l’avion le plus vendu dans le monde).
« Les premiers contacts avec Boeing ont été difficiles, se souvient Jean-Claude Streel. Nous n’avions aucun retour, face à ce géant de l’aviation, au préalable très méfiant. Il a fallu l’intervention d’un ancien ambassadeur américain à Bruxelles pour nous introduire auprès de Boeing. L’ambassadeur, ancien pilote de l’US Air Force qui a testé notre prototype au Bourget, a été directement emballé par le simulateur. Il nous a alors placés sur la liste des sociétés fréquentables auprès de Boeing. Depuis, tout se passe mieux. »
Potentiellement, le marché est mondial. Car en plus de la certification européenne, Venyo se fait fort d’également obtenir le feu vert des autorités américaines. « Après le salon de Farnborough, on visera la certification américaine, puis nous démarrerons la phase de diversification, vers les Airbus notamment », avance Jean-Claude Streel.