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Vogue La Ramée
parmi les siècles

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Brabant wallon  / Jodoigne

Par Bernard Roisin

Jadis abbaye, aujourd’hui lieu de séminaire et de détente, la ferme de La Ramée fait plus que s’admirer, elle se raconte !

Au milieu d'un océan de champs de blé, de maïs et de betteraves que le vent agite et caresse, un grand navire de pierre est amarré à la Grande Gette toute proche. Sa grande tour et celle située sur son porche lui servent de mâts tandis que son énorme grange en forme de bateau constitue sans doute son joyau. Culminant à vingt mètres de haut, cette grange dimière (où les paysans des environs venaient déposer leur dîme), avec son incroyable charpente, est la plus imposante de Belgique et repose sur des pilastres de pierre. Sa surface au sol est de 800 m² et date de 1713 comme tous les autres bâtiments encore visibles. Car le lieu fut d'abord une abbaye cistercienne fondée en 1216 qui accueillit des nonnes. On connaît le flair des ordres religieux lorsqu'il s'agit de trouver un endroit approprié pour établir leur communauté.

Situé entre Namur, Bruxelles et Louvain, le village de Jauchelette, entouré des terres fertiles de Hesbaye et bordé par la Grande Gette, constituait un lieu idéal pour permettre aux tenantes de la règle de Saint-Benoît de mener leur vie de prières. Malmenée comme le reste du pays par les divers envahisseurs, l'abbaye subit de nombreux pillages qui contraignirent souvent ses locataires à l'exil. Le lieu fut même transformé en hôpital militaire lors des guerres de succession au trône d'Espagne qui secouèrent l'Europe. Ainsi, l'abbaye reçutelle la visite du vainqueur de la bataille de Ramillies en 1706, le duc de Malborough qui s’opposa à Louis XIV. Eh oui, le fameux Marlbrough s'en est allé en guerre en passant par la Ramée.*

* Malbrough s’en va- t-en guerre est une chanson française du XVIII e siècle dont le protagoniste est le 1er duc de Malborough.

Au XVIIe siècle, l'abbaye connaît une nouvelle et dernière période de prospérité sous la domination autrichienne. Époque durant laquelle tous les bâtiments actuels furent bâtis, transformant le lieu en ferme-château adjacent à la congrégation. Mais suite à la Révolution française, l'abbaye est déclarée bien national en 1796. Laissé désormais à l'abandon, le pôle monastique, incluant le cloître et l'église, est hélas ! détruit. Ironie de l'histoire : en 1903, les soeurs du Sacré-Coeur, expulsées de France, s’installent à la Ramée et redonnent vie au couvent. Elles occuperont jusqu’en 2007 la partie abbaye située au-delà de la cour de la ferme qui fut classée dès 1980. Dès 1990, Jacques Mortelmans, qui achète la partie agricole, entreprend une rénovation à ce point minutieuse qu’elle est primée par un Caïus lors du prix Prométhéa et le bâtiment se voit attribuer le label « Patrimoine exceptionnel de Wallonie ». Lorsqu’en 2007, les soeurs mettent en vente la partie qui leur était encore réservée, Mortelmans se présente comme candidat acheteur naturel, permettant ainsi pour la première fois depuis 1789 la réunification de l’abbaye et de la ferme qui en dépendit.

Le propriétaire, par ailleurs producteur sur un autre site de la bière de la Ramée, termina la rénovation dans le reste de cet édifice remarquable qui, outre la superbe grange évoquée plus haut, se compose d’un corps de ferme en carré de briques rouges, rehaussé sur certains toits de fenêtres mansardées et disposant d’une tour d’angle à bulbe et d’un très beau porche surmonté d’une tour. L’ancien fumier transformé en pelouse accueille désormais un magnifique hêtre rouge. Dans la partie située au-delà de la ferme où auparavant se trouvaient le cloître, l’église, l’ancienne école et le quartier des hôtes, pendant un temps occupés par la famille Solvay, borde un parc magnifique au milieu duquel un miroir d’eau reflète le ciel changeant de cette partie orientale du Brabant wallon.

Choisi par Trigano

Le lieu a gardé son côté paisible, serein, spirituel, voire studieux. Depuis 2008, Jacques Mortelmans loue l’ensemble des bâtiments (exception faite de la partie qu’il occupe) à la société Châteauform, créée par Jacques Horovitz (l’un des fondateurs avec Jacques Trigano du Club Med), qui loue désormais plus de trente-cinq lieux exceptionnels en Europe (France, Italie, Espagne, Suisse, Allemagne, Angleterre), les réhabilite et transforme, et comme dans le cas de la Ramée, les aménage en prestigieux centres de séminaires. Ainsi, des étables décorées de fenêtres à mansardes accueillent-elles plus de trente salles de séminaires pourvues de tout le matériel performant nécessaire à ce genre de réunion. Sous les charpentes magnifiques et apparentes du corps de ferme, les participants jouissent de tout le confort nécessaire et de l’environnement adéquat au team building. Une congrégation religieuse au fond, c’était aussi une équipe. Décoré avec goût, le lieu se veut cosy et chaleureux. Il en va de même des chambres et des anciennes cellules au nombre de 110 qui disposent de tout le confort actuel, exception faite de la télévision pour répondre au principe du séminaire tendant vers l’interrelation. Par contre, l’on trouve des billards, flippers et autres kickers, des saunas, hammams et lits massant ainsi que deux restaurants. Par ailleurs, la grange et les anciennes écuries, également ponctuées de pilastres à colonnades et de voûtes, accueillent des réceptions de mariages ainsi que, récemment pour la grange, un concert classique dont le chef d’orchestre a salué la qualité de l’acoustique…

Mais c’est d’abord dans la mise au vert des troupes dans le cadre champêtre de ce lieu à l’histoire aussi fertile que les terres qui l’entourent que l’usage actuel adresse un clin d’oeil aux fantômes du passé. En effet, les nonnes travaillaient de concert dans une ambiance studieuse. De lieu de prière, La Ramée est devenu un lieu de réf lexion conservant la ferveur qui sied aux séminaires au point de métamorphoser les participants en de véritables… séminaristes.

 

Renseignements

Abbaye de la Ramée
Rue de la Ramée, 19
B-1370 Jauchelette
(Jodoigne)
+32 (0)10 23 71 71
www.ramee.be

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