- Business
Par Florence Thibaut
DES TECHNOLOGIES DE POINTE
En mai 2020, Novadip, spin-off de l’UCLouvain, réussissait la transplantation d’un tibia en 3D sur un patient de 5 ans, une première mondiale retentissante. D’autres biotechs de la région active dans le domaine des greffes, à l’instar de Cerhum ou Texere Biotech, illustrent tout le dynamisme wallon du secteur des sciences de la vie.
Née dans les couloirs des Cliniques universitaires Saint Luc, Novadip a connu un important développement il y a quelques mois : la greffe réussie d’un implant tissulaire de 18 cm³ dans la jambe d’un jeune patient. Spin-off de l’UCLouvain et pensée par le médecin Denis Dufrane, l’entreprise a été soutenue à sa création par la Sopartec, la société de transfert de technologies et d’investissement de l’UCLouvain. « En ayant permis d’éviter des amputations à de jeunes patients, Novadip a un vrai impact sociétal, note Philippe Durieux, CEO de la Sopartec, qui a facilité la création de près de 80 spin-off à ce jour. C’est la seule qui réalise un transfert de cellules différenciantes issues du patient lui-même. » La spin-off espère un lancement commercial d’ici 2026.
Boom des biosciences
Egalement lancée par le médecin et serial entrepreneur Denis Dufrane, Texere Biotech, s’est spécialisée dans la robotisation du traitement des tissus humains. Elle a ainsi créé la première ligne robotisée au monde pouvant recycler des greffons osseux. Fondée par le médecin Grégory Nolens, Cerhum, révolutionne, quant à elle, la chirurgie réparatrice en reconstituant de l’os en céramique grâce à l’impression 3D. Ces deux jeunes pépites ont bénéficié à différents stades de coups de pouce de la Région wallonne. « Dans chaque secteur, l’enjeu est de créer un écosystème qui crée de l’emploi et réinjecte de la valeur dans l’économie, ajoute Philippe Durieux. Dans le cas des biotechs, il y a un terreau fertile avec des fonds d’investissements dédiés et du personnel bien formé. Les talents sont une des briques essentielles. »
Philippe Durieux, le CEO de la Sopartec
Du laboratoire au marché
Partant d’une découverte scientifique qui nécessite la création d’une société dédiée pour poursuivre encore davantage la recherche, les spin-off ont un impact direct sur leur écosystème. Philippe Durieux : « La création d’un spin off est un processus qui s’étale sur une dizaine d’années voir plus. Le transfert de connaissances part du laboratoire vers le marché qui, en retour, re-challenge les chercheurs. »
A chaque fois, le but est que la recherche académique puisse avoir un impact sociétal direct ou indirect. Parmi les success stories récentes de la Sopartec, iTeos a inventé un nouveau paradigme au niveau oncologique. « Après 8 ans d’existence, elle est entrée au Nasdaq, ce qui est une première belge. C’est aussi l’illustration d’une combinaison réussie entre de la top science et un financement adéquat. Dans le secteur médical, je pense aussi à Axinesis, active dans la rééducation, ou Syndesi Therapeutics qui s’intéresse à la maladie d’Alzheimer… Les bons exemples locaux sont légion. »
www.novadip.com
www.sopartec.com
CERHUM PRODUIT EN 3D DES IMPLANTS OSSEUX SUR MESURE
Lancée en 2015 par Grégory Nolens, docteur en sciences biomédicales, Cerhum a mis au point une technique révolutionnaire de production d’implants osseux biocompatibles en 3D. « Notre entreprise est née d’une demande accrue pour des greffons plus durables, notamment dans le domaine maxillo-facial. La plupart des implants médicaux ont une durée de vie de 15 à 20 ans. Il faut ensuite réopérer. J’étais à la recherche d’une solution moins invasive », introduit Grégory Nolens, fondateur et CEO de l’entreprise.. C’est là qu’intervient MyBone, un implant biocompatible et imprimé en 3D, développé avec l’aide de la société louvaniste 3D Side et un co-financement de la Région Wallonne. L’innovation réside ici dans le choix des matériaux. « Nous avons opté pour la céramique, dont la composition s’approche de celle de l’os humain, principalement constitué de calcaire et de phosphate. Il ne s’agit pas d’une prothèse, mais bien d’un implant qui stimule la régénération osseuse. »
« Nous avons opté pour la céramique, dont la composition s’approche de celle de l’os humain, principalement constitué de calcaire et de phosphate. Il ne s’agit pas d’une prothèse, mais bien d’un implant qui stimule la régénération osseuse. »
Cas cliniques validés
Cinq ans après sa création, l’entreprise liégeoise lance ses implants sur le marché et, en mai 2020, elle fait parler d’elle suite à la première greffe mondiale d’un morceau de mâchoire artificiel produit en 3D lors d’une intervention à Saint-Luc. Les chirurgiens ont pour la première fois greffé à une patiente un implant labellisé MyBone. Le greffon artificiel est venu combler l’espace occupé par une tumeur et l’os mandibulaire a pu être reconstitué tel qu’il était avant la maladie.
Depuis lors, d’autres opérations, principalement de la face, ont également été réussies. « Pour le moment, nous avons d’excellents résultats post-cliniques. Les premiers clients repassent commande, ce qui est un signal très positif. Le grand avantage par rapport à d’autres techniques, c’est l’aspect sur mesure de notre approche. L’implant correspond avec précision à la morphologie du patient. De part sa composition, il s’intègre également mieux à l’organisme. »
Les prochaines étapes pour Cerhum seront de boucler une nouvelle levée de fonds, de compléter l’effectif pour parvenir à une équipe de dix personnes en 2021 et d’accélérer l’expansion internationale, avec l’Europe, les Etats-Unis et l’Asie en ligne de mire.