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© Elodie Timmermans

La Venanzi collection

  • Portrait

Par Alain Voisot

Les philatélistes sont des poètes qui utilisent des vignettes en guise de tickets pour voyager dans l’espace et le temps. Bruno Venanzi, le président du Standard, forme avec ses frères Marco et Luca une série originale.

 

 @Elodie Timmermans 

Il fut un temps où la philatélie était un réseau social international. Certes, le rythme des messages était risible, mais le contenu, le sujet, l’objet portaient bien des valeurs autrement plus fortes et pouvaient même façonner des destins.Durant l’entre-deux-guerres, un Belge de la région liégeoise et un Italien résidant dans le protectorat de Libye échangeaient des messages et des timbres… L’un et l’autre étaient agriculteurs. Les deux amis sympathisent et gardent un contact régulier malgré les errances d’une époque turbulente. Un jour des années ‘50, le correspondant belge sollicite son ami italien pour recevoir sa fille qui souhaite découvrir Rome. La jeune femme, seule et déterminée, est accueillie à Roma Termini par l’ami de son père. Le fils de ce dernier est géomètre et travaille à Milan. Quelques années plus tard, en 1958, l’échange retour s’organise. Le père demande à son ami belge de recevoir son fils qui souhaite visiter l’Exposition universelle de Bruxelles. C’est donc en Belgique que ces enfants du timbre se rencontrent et se font forte impression. Ainsi le diptyque, oblitéré, cacheté, est prêt à l’envoi sur la route de la vie. Ils décident de s’installer à Milan et de faire le chemin inverse de nombre d’Italiens qui montent en Belgique. Ils émettent eux-mêmes la première émission d’une série de trois. Après la naissance de Marco à Rome, en 1963, le couple revient en Belgique et conçoit la suite de la série avec Luca en 1967 et Bruno en 1970.

Italiens ou Belges ?

Quel que soit celui que vous contactez en premier, vous avez le tiercé gagnant. Les frères Venanzi ne sont jamais loin et chacun veille sur les autres. Leur itinéraire est pourtant totalement différent. Marco est un artiste de la bande dessinée, Luca un éditeur et un distributeur de livres “professionnels”, et Bruno un homme d’affaires avisé. Trois voies, trois succès, qui trouvent leurs racines dans le dynamisme hérité de leurs origines à la fois italiennes et belges. Mais, au fait, de quel côté leur cœur balance-t-il ?

« Mes liens avec l’Italie sont plus forts, mais je me sens vraiment partagé entre les deux pays, les deux cultures, répond Marco. “Dans ma jeunesse, j’aimais le personnage d’Alix parce qu’il est à la fois gaulois et romain et je me retrouve un peu dans ce profil ». Pour Luca et Bruno, nés en Belgique, l’évidence nordique s’impose, mais le tempérament italien ressort dans l’esprit créatif touchant plutôt les territoires économiques.

La recette du succès

Quand on leur demande s’ils connaissent la recette du succès, c’est le président du Standard qui tire le premier : “Il faut d’abord en finir avec la peur de l’échec qui, dans ce pays, reste stigmatisante, estime Bruno. L’environnement social et culturel incite à la prudence. Nos parents nous ont toujours laissé la liberté de voyager, nous avons été en Turquie en chemin de fer avec des cartes Interail. Le sens de l’aventure, savoir gérer les risques, cela s’apprend ». Lucareprend la balle au bond : « Par nécessité, il y a beaucoup de jeunes qui entreprennent. Et aujourd’hui, c’est le moment. La Belgique a un savoir-faire reconnu dans le domaine pédagogique, les sciences humaines et la BD ». « Créer Lampiris a été un vrai un défi, relance Bruno. Il faut faire ce que l’on à envie de faire et pas seulement s’accrocher aux opportunités. Il faut essayer pour ne pas avoir de regrets. L’objectif est de faire de sa passion son métier ».

@Elodie Timmermans 
 

Passionné de foot

D’où le rachat du Standard ? « Des trois, je suis le plus passionné par le football et ce, depuis ma tendre enfance. En outre, je pense qu’il y a encore un potentiel inexploité dans les segments du foot et de ses services dérivés. C’est une entreprise qui a un potentiel de croissance très fort, même si la performance commerciale dépend des résultats sur le terrain. C’est donc un pari grandiose. Il faut savoir anticiper de plus en plus vite avant que tout ne change. »

Marco, Bruno, Luca, trois succès dont l’origine est liée au choix d’entreprendre avec passion et constance dans un esprit d’indépendance. Leurs parents et grands-parents n’étaient pas dans les affaires, mais ils leur ont donné l’ouverture d’esprit nécessaire pour oser. Une vraie force dans un petit pays où tout le monde se connaît et l’échec est interdit. Surtout après dix ans de stagnation économique.


Marco l’artiste

Droit d’aînesse oblige, Marco est surtout connu pour sa contribution à la série Alix après des études d’illustration et de bande dessinée à l’Institut St Luc de Liège et quelques réalisations couronnées en 2003 au Festival international de la bande dessinée d’Angoulême. L’album Auriac (scénario de Benoît Despas) relatant les aventures d’un jeune gaulois en terre de Palestine, est récompensé par le Prix international de la bande dessinée chrétienne francophone. En 2008 il a rejoint l’équipe des dessinateurs collaborant avec Jacques Martin chez Casterman.

 

Luca l’éditeur

Luca débute chez Wolters Kluwer où il apprend durant six ans le métier d’éditeur. En 1998, une rencontre avec les responsables de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Liège décide de la création d’une Société Anonyme détenue à 70 % par la CCI et à 30 % par lui-même. Ainsi naissent les Éditions de la Chambre de Commerce et d’Industrie SA, ayant pour logo Edi.Pro. Seul à bord, Luca commence fin 1998. Il n’édite que des ouvrages de vulgarisation de haut niveau destinés aux managers de PME et à leurs experts-comptables, mais aussi aux enseignants et à leurs étudiants. Les thématiques de gestion et d’entreprise sont développées par des spécialistes. Ce parcours, partant de zéro, aura valu à Edi.Pro le prix 2007 du « Livre du Manager » décerné par « L’Écho ».

 

Bruno l’entrepreneur

Passionné de littérature et d’œnologie, Bruno est titulaire d’une licence en histoire de l’Université de Liège et une autre, en économie, de l’Université d’Amsterdam. Il entame son parcours chez Belgcam, MCI WorldCom et Certipost. Il est très impliqué à Meusinvest comme administrateur et préside le réseau « Wallonie entreprendre » pour aider de jeunes entrepreneurs à se lancer et à prendre des initiatives. Son parcours s’accélère en 2003. Il crée Lampiris lors de la libéralisation du marché de la distribution d’énergie. Le créneau de la « production belge et verte » est un bon choix. En juin 2016, lui et son associé, Bruno Vanderschueren, revendent Lampiris – qui compte alors plus d’un million de clients belges et français – au géant pétrolier Total. Montant de la transaction : 180 millions €. Que faire de cette fortune ? Comme beaucoup d’Italiens, il est accro de football. Il investit dans le club du Standard de Liège et en devient le président. Simple.

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