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Par Christian Sonon
La mobilisation des fonds publics, qu’ils soient régionaux ou cofinancés par les fonds structurels européens, a permis de poser les balises du développement à travers la création des infrastructuresde base et la viabilisation du site. Ces investissements préalables ont mis le secteur privé en condition pour prendre le relais et ainsi compléter et enrichir la gamme des attractions. Telles sont les clés de la réussite des Lacs de l’Eau d’Heure, première station touristique de Wallonie, dont le développement économique profite aujourd’hui à toute la région.
1. LE CROCODILE ROUGE
L’histoire de Jean-François Baelden et de son Crocodile Rouge est à la fois incroyable et exemplaire. Voilà un homme qui, après une formation en psychologie et une première (grande) expérience dans la gestion de magasins de sport, découvre soudain l’attrait des Lacs de l’Eau d’Heure. Nous sommes en 2004, la fibre commerciale est en lui, mais son idée de création d’un centre d’hébergement tombe à l’eau. Pas grave, il revient à la charge avec un projet un peu bizarre : une attraction centrée sur un véhicule amphibie qui ferait le tour du lac (de la Plate Taille) avec des touristes à bord avant d’y plonger la tête la première ! « C’est en découvrant ce véhicule – un bus scolaire recouvert d’une coque navale – en vente au Canada que l’idée m’est venue, explique le Nalinnois. J’ai pris des risques fous puisque je l’ai acheté et fait acheminer par bateau ! C’était une véritable première pour tout le mondeen Belgique. » Mais Jean-François Baelden n’a pas peur de forcer les portes et, en 2006, aidé par un fonds de participation de la Région wallonne et soutenu par une banque qui lui fait confiance, il se jette à l’eau avec son amphibus déguisé en Crocodile Rouge. Les frais d’entretien annuel du véhicules’élèvent à près de 40 000 € ? Qu’importe puisque, dans le même temps, il embarque 20 000 personnes. S’il a dû ramer au début, il navigue maintenant serein. Il reprend l’exploitation Horeca du Centre d’Accueil de la Plate Taille (Le Crocodile Café) et, en 2011, toujours soutenu par l’ASBL Les Lacs de l’Eau d’Heure, il investit dans deux nouvelles attractions : le laser game et l’Aqua Golf. Puis, en 2014, toujours au même endroit, il propose des activités de chars à voile. Une première dans lesterres pour cette activité née sur la côte belge. « Je cherchais un sport qui se pratique en hiver afin de sortir des activités saisonnières et de préserver l’ensemble de l’emploi toute l’année », explique notre investisseur qui annonce, pour octobre, le 3e Trophy de chars à voile sur une piste de 700 m de long. « C’est la distance entre deux brises lames et, donc, la distance officielle du championnat du monde. »
2. LE GOLDEN LAKES VILLAGE
C’est dans un domaine protégé et orienté plein sud, avec une vue directe sur le Lac de la Plate Taille,que le Groupe Lamy, fort de son expérience dans le sud de la France, s’est lancé en 2010 dans laconstruction du Golden Lakes Village. En résulte un ensemble de 250 villas à ossature boisparfaitement intégrées à la nature. « C’est notre premier projet de cette ampleur en Belgique, explique Jordane Lamy. Nous avons été convaincus par le travail réalisé en amont grâce à la Région wallonne et aux fonds Feder. Alors qu’en France, nous avons dû construire nous-mêmes des attractions afin d’attirer la clientèle, ici, tout était en place. Le site était déjà attractif quand nous sommes arrivés. Et ce sont également les fonds publics qui ont permis l’aménagement des voiries et des plages. » Alors que plus de la moitié des villas sont terminées et que le groupe familial wallon annonce pour 2017 l’ouverture d’une résidence hôtelière, le responsable est plus que satisfait : « Entre 2014 et 2015, à nombre de villas constant, notre chiffre d’affaires a augmenté de 30 %. C’est la preuve de l’attractivité croissante du site qui peut proposer aujourd’hui un panel d’activités pour toutes les saisons. »
3. THE SPIN CABLEPARK
Le ski nautique et le wakeboard en mode bio The Spin Cablepark a ouvert ses portes en été 2011 sur le Lac de Féronval. Avec ses 350 membres, il constitue le deuxième plus grand club de ski nautique en Wallonie. Un club qui présente deux particularités : c’est un téléski nautique, c’est-à-dire que lesskieurs et wakeboarders sont tractés non pas par un bateau, mais par un câble, et il est 100 % autonome en énergie grâce aux 168 panneaux photovoltaïques installés sur le toit du club house. Plusécologique, plus silencieux, moins cher et permettant un plus grand volume de participants par heure qu’en bateau, ce téléski nautique permet au grand public de s’initier ou de se perfectionner. « Le matin, nous renvoyons dans le réseau une partie de l’électricité que nous produisons ; la journée, nous l’utilisons pour nos propres besoins ; le soir, nous en pompons pour faire fonctionner le bar et le restaurant, explique Cédric Vandermot, créateur du concept. Au total, nous produisons plus d’électricité que nous n’en consommons, soit entre 40 000 et 43 000 kWh par an. »
Comme son associé Xavier Bonnet, Cédric Vandermot est un fervent adepte de ski nautique. C’est cette passion commune qui les a poussés à entreprendre sur le site des Lacs de l’Eau d’Heure. En cinq ans, ils ont investi dans leur projet 1 600 000 €, dont une partie subsidiée par le Commissariat Général au Tourisme. « Nous y avons cru dès lors qu’il était clair que le site était en train de sedévelopper et qu’il était en marche pour devenir une destination touristique remarquable », explique ce bioingénieur spécialisé en énergies renouvelables et, notamment, en panneaux photovoltaïques. « Notre démarche pour la construction du club house était plutôt inhabituelle, puisque j’ai commencé par dimensionner sa toiture afin d’être sûr de disposer de l’énergie nécessaire pour faire tourner notre installation. Puis, je suis allé trouver un architecte pour qu’il conçoive le bâtiment en dessous. »
Une installation « durable » que les fondateurs ont complétée d’une pompe à chaleur, de déflecteurs de lumière, d’un système d’isolation performant, ainsi que de plusieurs citernes à eau de pluie pour les sanitaires. Aujourd’hui, The Spin Cablepark est non seulement un pionnier dans le secteur, mais ilprouve qu’entrepreneuriat et écologie peuvent engendrer un mariage réussi.