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Par Carole Depasse
Lambda, la lumière, x, l’inconnue. Lambda-X développe des systèmes optiques hautement performants pour des applications spatiales et industrielles.
Pour découvrir Lambda-X, il faut prendre de la hauteur. Car l’histoire de la société débute en 1996 comme spin-off du laboratoire de microgravité de l’Université libre de Bruxelles (ULB) dont les travaux de recherche sont orientés vers les technologies spatiales. En 2004, la société devient totalement indépendante de l’ULB et s’installe à Nivelles où elle se trouve toujours actuellement. Déjà reconnue par l’Agence spatiale européenne (ESA) et les acteurs privés associés au secteur pour son savoir-faire technologique, notamment en mécanique des fluides, Lambda-X poursuit ses recherches en métrologie et en optique. « C’est notre cheval de bataille, et c’est important, car les instruments d’optique qui ont des applications dans la vie de tous les jours sont issus de cette recherche », précise Laurent Malfaire, directeur commercial. En effet, l’excellence en ingénierie optique et l’utilité de la société se mesurent dans le transfert de développements spatiaux dans notre quotidien. Le bénéfice est énorme et justifie à lui seul les budgets publics alloués à l’espace et ses mystères.
Tour du monde
Entre 1996 et 2014, Lambda-X est passée de 3 à 24 salariés, la plupart avec une formation en sciences, physique ou ingéniorat. Sur les trois dernières années, la société a doublé son effectif. Une belle croissance. Le transfert du savoir-faire technologique acquis dans les applications spatiales vers l’industrie optique a boosté l’entreprise. Depuis 2003, de nombreuses technologies développées et mises en oeuvre dans les laboratoires de Nivelles, et pour lesquelles Lambda-X a gagné une compétence, ont été appliquées à l’industrie. Par volonté de diversification et parce que les aléas de l’explosion de la navette spatiale Columbia ont secoué le marché de l’espace. « Ce tournant nous a permis d’approcher d’autres marchés et de développer des applications optiques terrestres qui, actuellement, occupent 50 % de nos activités. Verres de lunettes, lentilles de contact, implants intraoculaires (chirurgie de la cataracte)… Ces produits sont contrôlés qualitativement par nos instruments de par le monde. Nous développons des systèmes optiques de mesure et de contrôle originaux. Nous intervenons également comme consultant et conseil pour améliorer ou remettre à jour un système existant ou obsolète. » Au niveau international, la société Lambda-X est partout représentée. « Sur le marché des lentilles de contact, une industrie en plein essor, nous travaillons, entre autres, avec deux des quatre leaders mondiaux, producteurs de lentilles jetables. En ce qui concerne les implants intraoculaires, nos instruments contrôlent aujourd’hui près de la moitié de la production mondiale. Ils se trouvent notamment en nombre sur quatre continents, équipent le leader du marché et également chez Physiol, unique fabricant belge d’implants, situé à Liège. »
VORTEX
Caractéristique principale de Lambda-X : tout est développé en interne depuis la conception de l’instrument jusqu’à sa production en série. « Nous assurons la totalité de la chaîne de production à l’exception de la fabrication des composants. Si vous prenez le cas d’une lentille optique, énormément utilisée dans les instruments d’optique, la lentille est « designée » par nos ingénieurs, mais nous ne la fabriquons pas. Cette tâche est confiée à des sous-traitants. En revanche, l’assemblage des éléments, le prototypage et la production en série de l’instrument final sont assurés ici. » Les applications industrielles des instruments de mesure optique sont nombreuses, mais peu « visibles » ou méconnues du grand public. Par exemple, Lambda-X a mis au point un système qui analyse les « vortex » en bout de piste d’aéroport. Quand un avion décolle, il crée ce que l’on nomme la turbulence de sillage, un phénomène dangereux si un avion entre dans cette perturbation laissée par l’avion qui le précédait. Lambda-X a développé la partie optique d’un système de visualisation de ces vortex : installé en bout de piste, il contrôle la stabilité de l’air avant le décollage.
MEDUSA
Au niveau spatial, Lambda-X œuvre au développement de deux grandes familles d’instruments destinés soit à l’observation, soit à la réalisation d’expériences scientifiques embarquées. Dans le premier cas, il s’agit d’appareillages d’observation du ciel (à partir d’un satellite) ou du sol (à partir d’un satellite, d’un drone ou d’une fusée-sonde). « Nous avons développé, dans le cadre d’une collaboration avec l’Institut flamand de recherche technologique (VITO), le système optique (jeu de lentilles) d’une caméra, MEDUSA, placée comme une torpille sur un drone d’observation équipé d’ailes solaires. » Il y avait dans cette commande deux challenges : le poids (la totalité du système ne pouvait pas dépasser 2,5 kg) et le système devait conserver des performances optimales entre +20° C et -55° C. L’application devait donc être ultralégère et supporter des écarts de température importants. Le choix des matériaux a dès lors été crucial. Ceux-ci devaient se dilater ou se comprimer de manière à conserver les distances entre les lentilles du système soumis à la dilatation thermique. Un défi relevé par Lambda-X qui, en 2012, livre au VITO un système optique performant capable de fournir des images haute résolution de deux points au sol distants de 30 cm pour une altitude de vol de 18 km. Une caméra utile pour retrouver, par exemple, la trace de survivants après un feu de forêt, analyser l’état de la végétation dans une zone balayée par une tornade ou la canopée de la forêt tropicale. « On aurait même pu envoyer MEDUSA au-dessus de Fukushima pour une observation non risquée », ajoute Laurent Malfaire. L’avenir : l’imagerie hyperspectrale aux applications multiples dont le secteur prometteur du biomédical (analyse microscopique). « Nous avons des idées et un module en phase de développement pour lequel nous avons demandé un brevet. »
Transit Espace-Terre
Dans le second cas, les instruments développés par Lambda-X analysent, contrôlent et enregistrent des expériences scientifiques menées par les spationautes en vol. Dans le cadre d’une de ces expériences, Lambda-X a mis au point une technologie brevetée, connue mondialement sous son acronyme commercial NIMO (Nouveaux Instruments de Mesure Optique). Un bel exemple de transfert du savoir-faire technologique spatial vers le secteur industriel dont l’industrie ophtalmique. Il semblerait que Lambda-X soit en permanence entre Nivelles et l’espace. Prochainement, la société « s’envole » de nouveau pour Mars. Lambda-X est en effet responsable du développement de UVIS* (Ultraviolet & VISible), un des trois instruments présents sur la mission NOMAD, première mission du programme « Exomars Trace Gas Orbiter ». Cette mission est la première mission conjointe de l’Agence spatiale européenne (ESA) et l’agence russe Roscomos.
* UVIS est un spectromètre miniature destiné à une mesure à haute résolution de molécules telles que l’ozone, l’acide sulfurique et les aérosols présents dans l’atmosphère martienne (dans l’ultraviolet et le visible). NOMAD permettra une cartographie des composants de l’atmosphère martienne par le travail conjoint d’UVIS avec deux instruments supplémentaires travaillant dans l’infrarouge.
Informations :
Avenue Robert Schuman, 102B-1400 Nivelles
Tel. : +32 (0)67 79 40 87
lmalfaire@lambda-x.com www.lambda-x.com