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Par Frédérique Siccard
Ancrée depuis plus de 45 ans dans le paysage wallon, la société liégeoise Klinkenberg est active dans le p, les solutions de stockage, les systèmes d’alarmes et de sécurité, et les techniques spéciales (électricité et chauffage).
Depuis 2010, elle se lance aussi, et surtout, dans l’accompagnement de la transition énergétique et les solutions décarbonées.
© Klinkenberg
Dans le Zoning des Hauts-Sarts, à Herstal, Klinkenberg et huit autres entreprises ont formé une communauté énergétique,
c’est-à-dire qu’elles se partagent leurs productions d’énergie électrique.
« Klinkenberg est une société familiale qui emploie 200 personnes et développe depuis 10 ans son département Photovoltaïque & Transition énergétique. Nous avons commencé avec de petites installations résidentielles, puis d’autres, plus importantes, pour des entreprises. Aujourd’hui, il n’est pas rare que nous placions 600 à 1000 panneaux sur une seule installation », explique Michel Croes, en charge de plusieurs projets au sein de l’entreprise. Des chantiers qui permettent rapidement à Klinkenberg de conforter son expérience et d’envisager le développement des systèmes de stockage, le monitoring des installations et l’optimisation de l’autoconsommation.
« Ces projets de recherche sont pour nous essentiels. Grâce à eux, nous pouvons diriger nos clients vers les solution les plus adaptées, mais aussi élargir le champ des possibles, souligne l’ingénieur. Ainsi, alors que nous travaillions déjà sur un projet de batterie de stockage, il m’est apparu, en 2017, qu’il était incohérent en terme de pertes : pourquoi enregistrer 30 % de déperdition en alternant sans cesse courant continu et courant alternatif entre la production et la réémission d’électricité, quand la plupart des appareils fonctionnent aujourd’hui en courant continu ? Imaginez que, pour installer un éclairage de 5 watts dans une rue, la commune en consomme – et en paie –15 ! Nous avons donc réfléchi autrement… »
Michel Croes est en charge de plusieurs projets au sein de l’entreprise.
Un MIRaCCLE ne suffira pas
Ainsi naît, en juillet 2020, MIRaCCLE, le projet de Micro- réseau Industriel avec Raccordement en Courant Continu et Luminaires Extérieurs. «L’objectif est de mettre en place, pour la première fois en Wallonie, en Belgique et dans les régions proches, un réseau moyenne tension en courant continu. Ce réseau permet le par- tage, entre neuf entreprises du Zoning des Hauts-Sarts, à Herstal, des productions d’énergie électrique générée par panneaux photovoltaïques et stockée dans des batteries externes, dans une communauté énergé- tique dédiée. En maintenant le courant continu tout au long du pro- cessus, nous affichons un gain énergétique de l’ordre de 30 %. »
Si Klinkenberg opte pour plusieurs batteries externes (ou silos), plutôt qu’une seule, c’est pour pouvoir équilibrer les échanges et assurer le back up nécessaire à chaque entreprise : « Si une société affiche simplement un besoin d’autonomie de 24 heures pour le fonctionnement de ses frigos, une autre ne peut connaître aucune microcoupure d’énergie, sous peine de voir sa production s’arrêter. À l’inverse, si les silos ne sont pas toujours pleins, le gestionnaire du réseau de distribution RESA peut y réinjecter une partie de sa pro- duction excédentaire. Chaque silo répond donc à des paramètres spé- cifiques, en fonction des besoins et de la capacité de production de chaque entreprise... auxquels il faut ajouter la météo et les conditions variables d’ensoleillement à l’année ! »
À l’issue de l’étude, subventionnée par la Région wallonne à hauteur de 2,5 millions d’euros (sur 11 millions nécessaires), le réseau physiquement installé retournera dans le domaine public. Il sera mis à la disposition de RESA, tout comme l’installation d’éclairage public menée parallèlement pour le compte de la Ville d’Herstal associée au projet (60 poteaux alimentés en cou- rant continu, dotés d'une “intelligence” propre, ce qui génère un gain économique de l’ordre de 70 % pour l’éclairage public). « Un MIRaCCLE ne suffira pas : il en faudrait une dizaine pour pouvoir réguler le réseau », conclut Michel Croes.
CE+T, le partenaire spécifique
Spécialiste en électronique de puissance depuis les années 1960, CE+T est associée au projet MIRaCCLE dès ses prémices. Objectif : concevoir et fournir le bon convertisseur, et s’assurer qu’il s’intègre dans toute l’installation. Un défi que ce conglomérat multinational d’entreprises, qui fournit les solutions optimales d’alimentation de secours afin de garantir la continuité des activités et économiser l’énergie, devrait relever haut la main.
« Concevoir le bon convertisseur n’est pas le seul challenge de ce projet, relève Robert Eyben, CEO de la Holding CE+T. L’expertise de tous les acteurs impliqués sera utile pour identifier et définir d’autres aspects, tels que le niveau de tension optimal pour le micro-réseau, les dispositifs de protection appropriés, le bon système de contrôle et les gains d’efficacité grâce au courant continu. »
ARTHUR,
L’AUTRE « BÉBÉ » DE KLINKENBERG
Le projet ARTHUR (Approche de la Rénovation Techno-logique de l’Habitat Urbain) vise « à mettre en œuvre une approche holistique de la rénovation d’un bâti urbain à vocation sociale, datant des années 1960 et considéré comme énergivore, voire totalement déclassé au regard des performances énergétiques actuelles ».
« Klinkenberg entend ainsi, dans un espace démonstrateur situé à Vottem, associer des équipements avec une valeur ajoutée qui dépasse la somme de chaque produit : la production, le stockage et la distribution de l’énergie électrique en courant continu, la mise en œuvre d’une isolation renforcée, l’intégration de systèmes de ventilation double flux décentralisés, l’amélioration de la gestion du renouvellement d’air, explique Michel Croes. Si la rénovation est efficiente, elle fera de ces habitations des logements énergétiquement autonomes, ou presque, en autoproduction photovoltaïque optimisée à 98 %. »
Ce projet vise, en effet, à réaliser une réduction de 90 % des pertes thermiques, de 80 % des besoins de chaleur et de 20 % des pertes de distribution d’électricité, par la mise en place d’un réseau en courant continu à basse tension. « Nous imaginons un apport en courant alternatif pour le gros électroménager, notamment, lequel ne se mettra en route que lorsque l’électricité « propre » sera disponible. Nous parlons également d’intelligence embarquée pour l’éclairage et nous parions, comme pour MIRaCCLE, sur la mutualisation des échanges. A moindre échelle, évidemment, puisqu’il s’agira d’installer six silos pour douze habitations. »
55.000 logements sociaux wallons à rénover
Avant / Après
ARTHUR devrait permettre d’éprouver, puis de valider, la méthode, sous forme de « recherche action ». Un guide utilisateur sera rédigé pour sensibiliser gestionnaires et occupants à l’usage de tels bâtiments. En plus de la réalisation, une période de suivi des bâtiments (consommations, usage, durabilité des solutions, écolage des gestionnaires/locataires) permettra la communication et la diffusion des résultats. « Pour ce projet spécifique, nous travaillons exclusivement avec des entreprises wallonnes, à l’exception de Daikin, société internationale pour laquelle nous développons, en marge du projet en collaboration avec CE+T, une interface en courant continu dans le cadre d’un accord avec les dirigeants de son siège de production européen, implanté à Ostende », souligne Michel Croes.
En Wallonie, le gouvernement a l’intention de rénover 55.000 logements sociaux et d’en réaffecter 3.000 nouveaux d’ici trois ans, contre 15.500 logements (sur environ 40.000) à Bruxelles. Klinkenberg entend les aider à « répondre aux enjeux climatiques de demain ».