- Business
- / Success story
Par Gilles Bechet
Pionnière dans la géolocalisation, l’entreprise namuroise Market-IP combine la puissance de la télématique avec les données cartographiques afin d’optimiser la mobilité des flottes de sociétés.
Pour beaucoup d’entreprises, la mobilité, c’est la vie. L’efficacité et l’optimisation en temps réel des déplacements d’une flotte de véhicules génèrent des gains de temps et surtout d’argent. Bien sûr, avec la généralisation du GPS, on a fait un sérieux bon en avant, mais ce n’est qu’une toute petite partie de la solution. Un trajet entre un point A et un point B à bord d’un véhicule génère une foule de données qui n’attendent qu’à être optimisées. Elles sont aussi au cœur des compétences et du métier de la PME namuroise Market-IP qui vient de remporter un des prix à l’exportation décernés par l’Agence wallonne à l’Exportation et aux Investissements étrangers (AWEX) en 2016.
Des solutions logicielles
L’aventure commence en 2001 quand Arnaud Storder, jeune licencié en sciences géographiques, se lance dans la cartographie digitale en ligne. Pour se différencier des poids lourds du secteur, il développe « Telefleet » qui rassemble des solutions logicielles liées à la localisation des véhicules. Cet outil qui permet de localiser à distance les déplacements de tout type de véhicule s’impose comme un dispositif particulièrement efficace en cas de carjacking. Il offre également aux flottes à l’arrêt des opportunités de télémaintenance. Dans la foulée de ce premier succès, Market-IP affine sa stratégie qui se concentre sur la conception de logiciels en laissant à d’autres la fabrication des boîtiers et, à des partenaires, la vente et l’installation de l’ensemble du dispositif dans les véhicules.
Dans les années qui suivent, la PME introduit « Geoplanning », un outil de planning géographique qui permet, d’une part, de préparer et d’optimiser les déplacements et, grâce à une interface avec les systèmes de gestion interne de l’entreprise, une gestion optimale des stocks nécessaires aux réparateurs et, d’autre part, d’augmenter le nombre d’interventions et de simplifier les factures d’intervention.
Dernier né dans la boîte à outils de Market-IP, « Drivexpert » est un logiciel qui analyse le comportement du conducteur, tant d’un point de vue sécurité que de la consommation. Les données recueillies peuvent se révéler particulièrement intéressantes pour les sociétés de leasing et les fleet managers qui cherchent à promouvoir un usage plus économique et écologique des véhicules d’entreprise ou pour la compagnie d’assurance ainsi à même de proposer des contrats sur-mesure adaptés au comportement du conducteur.
Évolution permanente
Grâce à son modèle économique indirect, l’entreprise fonctionne avec un nombre réduit de collaborateurs, une vingtaine aujourd’hui, et concentre l’essentiel de son travail sur son site de Naninne. Grâce aux collaborations avec différents fabricants, Market-IP peut proposer à son utilisateur final une soixantaine de boîtiers différents en fonction du type de véhicule ou des conditions d’exploitation. Un camion qui traverse le désert n’a pas les mêmes besoins qu’une camionnette qui circule en ville. Un des maîtres mots de l’entreprise est l’adaptabilité. Chaque utilisateur a des attentes différentes. L’équipe est majoritairement composée de développeurs qui travaillent à l’évolution permanente des produits. « Chaque semaine, nous proposons des mises à jour dont bénéficie l’ensemble de nos clients. Parfois, ça part d’une réponse à une demande spécifique, mais dès qu’une fonctionnalité est susceptible d’intéresser un cercle plus large d’utilisateurs, nous la partageons à plus grande échelle », explique Sarah Laval, Marketing Manager.
L’organisation chez Market-IP est très horizontale et le turnover très faible. Un informaticien qui entre comme développeur peut passer de la programmation au développement d’applications mobiles s’il fait preuve d’une sensibilité particulière à ces outils. Pour répondre au plus près aux besoins de l’utilisateur, l’équipe de développeurs a adopté la méthode SCRUM. « Au lieu de travailler de manière très compartimentée, étape après étape, on a décidé de travailler par itérations, en équipe avec un reporting quotidien. Cela nous permet d’accélérer les développements, d’augmenter la qualité, d’aligner les besoins réels du marché avec les exigences business. »
Les mises à jour répondent à la fois aux sollicitations des utilisateurs et à un travail de veille sur les tendances du marché. « Certaines demandes de développement peuvent nous demander 9 heures de travail, d’autres 20 à 30 jours. On module les développements en fonction de leur importance et de leur potentiel », avance Romain Olieslager, Middle East Business Developer. Quand certains besoins spécifiques dépassent les compétences disponibles en interne, l’entreprise peut s’adresser à des centres de recherches universitaires. Ce fut le cas avec le CETIC à Charleroi pour le développement d’algorithmes ; ce le sera peut-être avec le Centre de Recherche Information, Droit et Société (CRIDS) en prévision des nouvelles dispositions européennes en matière de respect de la vie privée. « On s’efforce d’intégrer en interne un maximum de développements, notamment ceux liés au mobile. Chaque fois qu’on sous-traite, on perd en maîtrise et en réactivité », pointe Sarah Laval.
Besoins particuliers
Les clients de Market-IP se répartissent dans les entreprises de transport de tout type, de leasing, mais aussi dans le secteur pétrolier ou celui de la construction. Dès 2007, la société commence à développer ses activités à l’étranger. Aujourd’hui, la PME est présente en France, en Belgique et en Nouvelle-Calédonie, ainsi qu’au Moyen-Orient (Qatar, Oman et Arabie Saoudite) et en Afrique subsaharienne. Chaque marché a ses besoins particuliers et ses leviers pour accroître des parts de marché dans les pays limitrophes. Au Sultanat d’Oman, le transport pétrolier, très réglementé, donne un peu le « la » aux autres secteurs en matière d’équipement. « Nous y sommes depuis 2011 et, aujourd’hui, nous occupons la deuxième ou troisième place sur le marché. » Par contre, au Qatar où Market-IP est actif commercialement depuis un an, ils découvrent un territoire où l’on n’a encore jamais entendu parler d’une gestion télématique de la flotte. En Afrique, où il faut tenir compte d’une flotte très dépareillée avec des véhicules parfois très anciens, un des problèmes les plus préoccupants est celui du vol de carburant. « Nous installons des sondes dans les réservoirs qui émettent une alarme en cas de baisse soudaine de plus de 5 % de la jauge », souligne Romain Olieslager.
Malgré ses attributions, le jeune attaché à l’export ne passe pas sa vie dans les avions. Les séjours n’ont pas besoin d’être longs pour autant qu’ils soient réguliers. « On essaie de visiter les partenaires trois à quatre fois par an et eux viennent à Naninne une ou deux fois également. Sinon, on se téléphone pratiquement tous les jours. On a remarqué que les visites sont presque toujours suivies d’un regain d’activité parce qu’on apporte de nouveaux développements et un surplus de motivation. »
Travail stratégique
Market-IP aborde l’avenir avec confiance. L’entreprise a de nombreux marchés en développement à prospecter et de nouveaux partenaires à trouver, avec l’idée d’accroître encore l’offre et l’intensité du service. La croissance passera aussi par une évolution vers des produits mieux intégrés les uns aux autres. « On se rend compte qu’un nombre croissant de sociétés ont des besoins transversaux. Pour y répondre, il serait sans doute préférable de modifier et simplifier l’architecture de nos produits pour encourager les utilisations intégrées et monter en valeur auprès de nos clients », estime Sarah Laval.
Quand on évoque l’avenir de la géolocalisation télématique, un marché potentiel énorme se profile : celui de l’industrie automobile avec des véhicules équipés de série. « C’est un marché difficile pour une PME de 20 personnes. On commence un travail stratégique pour s’entourer des partenaires adéquats, parce que seuls, nous n’y arriverons pas. Ce qui est encourageant, c’est que l’évolution de l’architecture des produits va dans ce sens. Nos bases de données sont prêtes. 100 licences ou 10 000 ne feraient pas beaucoup de différences pour nous. Nous possédons le levier technologique nécessaire. Pas besoin de modifier notre structure ou d’accroître sensiblement notre personnel pour passer à la vitesse supérieure. »
EN BREF
Au cours des cinq dernières années, le chiffre d’affaires a plus que doublé. Au 30 juin 2016, il s’élève à plus de 2 000 000 €, dont 43 % à l’export.
25 % de croissance annuelle.
21 collaborateurs employés par Market-IP.
Plus de 35 000 véhicules et plus de 8 000 personnes géolocalisés.
Leurs logiciels sont compatibles avec plus de 60 modèles de boîtiers télématiques.
Projets et réalisations dans 10 pays