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Hainaut  / Mons

Par Lena Goessens

Des copains, du talent, de l’imagination. Des jeux video, des plateformes, le virtuel et la troisieme dimension. Les ingredients d’un studio de developpement delirant. Fishing Cactus, une entreprise bizarroide.

Il était une fois… deux virtuoses du monde artificiel, Bruno et Julien. Le grand groupe d’édition et de développement européen de jeux 10Tacle, dans lequel ils travaillaient et se côtoyaient, était actif dans le domaine du game-design jusqu’au jour où une zone de turbulences emmèna la société à la faillite en 2008. Les deux jeunes hommes décident alors de prendre le taureau par les cornes. C’est ainsi qu’ils combinent leurs forces et mettent sur pied les projets ambitieux qu’ils avaient en tête depuis tout ce temps pour créer leur propre boîte de développement au nom surprenant de Fishing Cactus. « Une appellation à l’origine tue pour des raisons top secrètes ! », s’amuse à expliquer Silvia, responsable des relations publiques.

C’est donc sur les cendres de 10Tacle que Fishing Cactus, reconnu aujourd’hui comme le développeur officiel de jeux vidéo pour Microsoft, Apple et Nintendo, a vu le jour en 2008. Tout a commencé dans la cave d’une ancienne maison à Cuesmes où les spécialistes du design, de la programmation, du graphisme et du développement se retrouvent pour partager leurs idées et leur passion pour les jeux vidéo. Ils vont convaincre Ramsès et Maxime — anciens employés, eux aussi, de 10Tacle — de les rejoindre. L’équipe des moins de trente ans s’est donc rapidement agrandie.

De la cave au garage, ils prennent leurs quartiers à Mons, dans un open space aux allures de loft industriel. En 2013, ils investissent dans un nouvel immeuble, plus spacieux et plus caractéristique, qui sera entièrement customisé par leur mascotte : le cactus.

Une famille hors pair

En attendant leur nouveau QG, l’équipe de Fishing Cactus occupe une grande salle tamisée, qui, tel un bunker, ne laisse pas filtrer la lumière extérieure. Il y a évidemment un cactus — un vrai ! — pour l’accueil, des murs et des bureaux décorés à la façon des employés et, bien en évidence, un cactus géant au sourire ravageur. Le tout dans une atmosphère détendue et bon enfant. Car ici, « quand on sort, on sort tous ensemble ! », confie Silvia, l’Italienne à l’accent prononcé. Et Andrea, designer depuis trois ans à Fishing Cactus, d’ajouter : « C’est un lieu où boss et employés sont sur la même plateforme. Notre petite équipe coopère chaque jour. Les projets mis en place doivent motiver l’ensemble des membres, ils sont soumis au regard de chacun et doivent plaire à tous. » « Les premières personnes à convaincre, c’est l’équipe ! », surenchérit l’artiste au style décontracté. Fishing Cactus tend donc à responsabiliser ses employés. Une sensibilisation qui passe aussi par l’investissement. Devenue à présent société par actions, l’entreprise mobilise son personnel à investir en ses lieux.

Une petite industrie… de grands produits

La grande famille, dont le cadet a 22 ans et l’aîné 31 ans, ne compte pas moins de 32 employés à l’imagination débridée et à l’analyse fine du secteur des jeux vidéo. Outre les casual games, les jeux traditionnels destinés au grand public, près de 50 % de leur marché concerne les serious games. Le lauréat des casual games, c’est Paf le Chien avec plus de 20 millions de joueurs de par le monde. Cette version mobile et très ludique consiste à envoyer le chien le plus loin possible après lui avoir donné un coup de pied. Une victoire lorsqu’on sait que l’application a été la plus téléchargée en France en 2011. Cette industrie vidéoludique a pour objectif premier de concevoir des jeux vidéo originaux, et ce, de l’idée à la mise en pratique sur plusieurs supports. C’est dans ce but que Mojito, leur moteur multiplateforme interne, a été créé de manière à distribuer les jeux vidéo sur différentes plateformes. Du mobile à la console, en passant par l’ordinateur, la plupart des jeux conçus par Fishing Cactus sont transposables.

Quant à la gamme de produits de la branche serious games, il s’agit de jeux ludiques à vocation pédagogique, d’apprentissage ou d’entraînement . Prenons l’exemple du programme R.O.G.E.R. — encore au stade expérimental et de dévelop-pement —, qui est destiné aux personnes qui pâtissent d’une défaillance cognitive ou intellectuelle, comme dans le cas de patients souffrant de la maladie d’Alzheimer. En cours d’études auprès d’une dizaine de cliniques de recherche à Bruxelles, ce jeu vise à reconnecter les synapses des patients afin qu’ils parviennent d’eux-mêmes à se souvenir de certaines actions à accomplir face à une situation particulière : mettre son maillot de bain dans la valise avant de partir au soleil. 

Vers les frontieres… et au-dela

C’est bien grâce à un seul axe d’exploitation que Fishing Cactus a pu convaincre la Région wallonne : les casual games. Cette petite entreprise, qui n’a pas connu la crise, a été récompensée par l’Agence wallonne à l’Exportation et aux Investissements (AWEX). Elle a raflé, cette année, le prix « Tremplin à l’exportation » grâce à un taux d’exportation n’excédant pas la barre des 70 % pendant trois exercices consécutifs. Mais pas seulement ! Fishing Cactus a rempli tous les critères pour endosser parfaitement le rôle de lauréat. Entre autres, son volume d’exportation s’est considérablement accru en l’espace de quelques années. La bande de copains a su démontrer qu’elle contribuait activement à la promotion de la qualité et du savoir-faire wallon hors des frontières belges et a été félicitée pour cette prouesse. Le succès grandissant, le studio de développement a dépassé, pour l’année 2011, le quota des produits exportés. Leur nombre de fans ne cesse d’évoluer. Les joueurs chinois, américains et japonais s’arrachent le téléchargement des jeux vidéo les plus emblématiques de Fishing Cactus comme Shift, sur iPhone, avec 16 millions de joueurs.

Seule au monde

À la conquête des marchés internationaux, Fishing Cactus enregistre à son palmarès plus de cinquante jeux différents disponibles sur une large gamme de plateformes digitales, Androïd, Windows, Xbox, iPhone, PC, Mac, Nintendo. D’ailleurs, parmi les forces de Fishing Cactus, on retrouve sa capacité à réagir simultanément sur tous les supports. Ce n’est pas tout. En Belgique, rares sont les studios de développement proposant des serious games aux entreprises, collectivités ou services publics. La concurrence locale est pour ainsi dire nulle. Et aux frontières du numérique, elle est inexistante. Mais d’autres forces, plus subtiles, font de Fishing Cactus une industrie qui travaille avec de grands partenaires comme Disney, SEGA, BigBen ou encore Ubisoft. « On a tous une histoire particulière. On a tous travaillé dans une grosse boîte où il n’était pas permis d’exprimer sa créativité », explique la jeune Sophie, assistante en relations publiques. Et d’ajouter : « Ici, notre opinion compte et c’est ce qui fait la différence sur un projet. Notre créativité est sans limites et comme nous ne sommes pas bridés, on réalise des merveilles ! » Mais pour répondre aux exigences de ses clients et respecter les délais, Fishing Cactus se doit, parfois, de refuser certains projets. « On ne peut pas grandir trop vite pour prévoir un développement durable de la société. On n’a pas envie de prendre trop de risques sur des gros projets si on ne peut pas garantir de livrer à temps ! », confie Silvia.

Des Creatures tant attendues

Le plus gros studio de développement en Wallonie refuse, certes, de gros projets mais a aussi du travail à en perdre la tête. Outre lacréation de jeux ludiques de découverte et de parcours pour Mons 2015 et Liège 2017, la fine équipe de Fishing Cactus s’affaire à la saga Creatures, un jeu culte né dans les années 90. « Depuis tout jeune, je suis passionné par ce jeu », s’engoue Andrea, game designer sur le projet. « Aujourd’hui, les messages de fans, qui attendent avec grande impatience la sortie de Creatures 4, se multiplient sur les forums. Et c’est génial ! » D’un graphisme archaïque de l’époque, Creatures s’est modernisé avec la 3D et les petites créatures attachantes se sont dotées d’une intelligence artificielle surprenante capable de simuler des gestes. Depuis deux ans, et pour la plus grande satisfaction des 20 millions d’adolescents qui ont grandi avec le jeu, Fishing Cactus et BigBen ont acquis la licence. Creatures, ce monde imaginaire où Norns, Grendels, Ettins vivent sur une même planète, est un concept qui se décline, depuis, aussi bien sur PC et Mac OS que sur iPod, iPhone et iPad. On peut y jouer de partout et reprendre la partie là où on l’a laissée. Cet environnement, au réalisme sans pareil, laisse une grande place à l’écologie avec une faune et une flore typiques. Les petits animaux, aux grands yeux et aux grandes oreilles et au pelage vert, rose, bleu ou encore violet, peuvent interagir avec leur univers et, même, avec vous. Les Norns apprennent, enseignent et s’adaptent. Sauf que, dans cette dernière série, les créatures naissent, se reproduisent et finissent par mourir. L’aventure fantastique est infinie. Que nous promet celle de Fishing Cactus ? ■

 

Les Belges, pionniers du web !

Pour rappel (voir waw n°11), les precurseurs d’Internet et des moteurs de recherche comme Google se trouvent au Mundaneum de Mons. Fishing Cactus s’y frotte depuis le 9 octobre dernier. Jusqu’au 1er juillet 2013, le Mundaneum perce les secrets de l’origine du web a travers son exposition Renaissance 2.0 : le savoir au bout des doigts. Pour retracer l’histoire de l’organisation de la connaissance et du savoir, le ≪ Google de papier ≫ propose de remonter le temps au cours d’un parcours interactif et de decouvrir, au fil de l’aventure, la fabuleuse histoire de deux visionnaires, Paul Otlet et Henri La Fontaine. Tous deux peres de la Classification Decimale Universelle (CDU).

Serious games

L’espace d’exposition a donc prevu une serie d’activites autour de l’evolution des sciences de l’information. C’est la que Fishing Cactus entre en scene avec son serious game disponible, meme apres l’exposition, sur tablettes Android. Ce jeu tres ludique va accueillir, guider et accompagner les enfants, les parents, les professeurs, et tous les visiteurs, a travers l’exposition. Une alternative pour decouvrir autrement le Mundaneum et sa lumineuse mappemonde. ≪ Le jeu va amener l’élève à se questionner sur le monde communicationnel dans lequel il évolue, sur l’avenir et sur la révolution que sa société est en train de vivre ≫, explique Sophie Schiaratura de Fishing Cactus. Mais le petit plus de cette animation est qu’elle est realisee en collaboration avec le studio de production de jeux video Atomic Turtles. Alors que Fishing Cactus gere les aspects artistiques et le design, le petit studio montois se charge, quant a lui, de la programmation. Quand des cactus rencontrent des tortues atomiques…

Informations : 

rue Descartes, 1
7000 Mons
Tel. : 065/22 58 86
contact@fishingcactus.com www.fishingcactus.com

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