- Dossier
Par Christian Sonon
Oubliées les rondeurs des terrils ! L’aéroport et l’aéropole de Charleroi sont désormais les deux mamelles de la reconversion économique de la région. Du petit lait pour les investisseurs comme pour les jeunes diplômés. Plongée dans le giron d’un parc scientifique en pleine croissance.
Certains en parlent comme d’une véritable Silicon Valley belge. Avec ses 180 entreprises générant plus de quatre mille emplois, le parc scientifique et technologique de Gosselies, à Charleroi, est devenu en moins de 20 ans un moteur de l’économie régionale. Mais un moteur qui n’est plus alimenté par le charbon ni forgé dans l’acier : à quelques jets de bagages de l’aéroport, dans ces bâtiments au design futuriste décorés d’un ruban de verdure, ce sont les cerveaux qui sont désormais en état de chauffe permanent. L’aéropole abrite en effet des entreprises actives dans les domaines de la santé, de l’information et la communication, de l’aéronautique et du spatial, et de l’industrie technologique. Bref, des sociétés dites « à haute valeur ajoutée ». C’est-à-dire tournées vers le futur…
« On a en effet vécu, à la fin des années 80, le déclin des sites sidérurgiques, miniers et verriers dans la région, expliquent Patrick Leclercq et Marc Arno, tous deux conseillers économiques pour IGRETEC, l’intercommunale qui gère l’ensemble des parcs d’activités économiques de la région de Charleroi et du Sud Hainaut. D’où la volonté des forces vives locales de changer de décor, de redonner des couleurs au Pays Noir en créant un aéroport régional et un nouveau type de parc d’activités qui romprait radicalement avec l’image des anciennes zones industrielles et créerait de l’emploi durable pour la région. »
Certes, celle-ci n’a pas attendu les années 90 pour penser à ce changement de cap et entamer sa reconversion. La plate-forme multimodale de Montignies-sur-Sambre, qui permet le transport combiné entre la voie d’eau, le chemin de fer et la route, ainsi que le parc d’activités économiques de Charleroi-Jumet et le parc de Courcelles, axé sur la logistique routière, avaient déjà ouvert au fil des ans la porte à nombre d’entreprises cherchant un nouveau site pour se développer. Mais dès 1994, les premiers fonds structurels européens accordés au Hainaut (Objectif 1), cumulés aux financements obligatoires de la Région wallonne, allaient encourager les acteurs locaux à dérouler sur une centaine d’hectares, au milieu des champs, ce magnifique tapis rouge en béton à l’intention des sociétés tournées vers le futur. Le développement économique de la région pouvait désormais passer les vitesses supérieures.
Un parc où les places se sont vendues au fil des ans au même rythme que les tablettes informatiques aujourd’hui. En cette fin 2012, seuls cinq hectares restent à attribuer.
La première entreprise à croire en la plus-value de l ’aéropole fut l ’Espagnole Europrinter qui y ouvrit ses portes en 1994. Pourquoi cette société active dans l’impression de quotidiens internationaux jeta-t-elle son dévolu sur le site carolo ? Parce que, dans cette activité, la disponibilité du personnel, la localisation et les possibilités de communication jouent un rôle important. Avec le jeune aéroport et les bretelles d’autoroute au bout des chaînes d’impression, les journaux bénéficiaient de magnifiques rampes de lancement vers la France, l’Allemagne, les Pays- Bas, la Grande-Bretagne et la Scandinavie.
En 1999, l’arrivée de l’Institut de Biologie et de Médecine Moléculaires (IBMM) et de ses chercheurs issus de la Faculté des sciences et de la Faculté de médecine de l’ULB, suivie quelques mois plus tard par l’inauguration d’Henogen, la première spin-off de l’université, allaient jeter les bases du « Biopole ULB Charleroi » et marquer la véritable envolée du parc scientifique et technologique qui allait rapidement s’affirmer comme un pôle d’excellence en Belgique. Un parc où les places se sont vendues au fil des ans au même rythme que les tablettes informatiques aujourd’hui. En cette fin 2012, seuls cinq hectares restent à attribuer.
Les raisons d’un succès
« En plus de sa location et de son accessibilité, il y a deux raisons essentielles qui expliquent le succès de l’aéropole, explique Patrick Leclercq. Primo, parce qu’il englobe dans son périmètre des bâtiments innovants sur le plan architectural – c’est important pour l’image des entreprises –, des lieux de restauration, des sentiers de promenade et des services divers comme une banque et une crèche, le site a tous les atouts pour attirer un large public et contribuer à la qualité de vie de ceux et celles qui y travaillent. Secundo, l’aéropole présente dans chaque secteur la filière complète du monde du travail : des instituts de recherche, des centres de formation et des entreprises. Par exemple, dans le secteur des technologies de l’information et de la communication, la quinzaine d’entreprises présentes peut prendre appui sur le CETI C et ses chercheurs en informatique et sur le centre de compétences Technofutur TI C qui organisent annuellement 450 000 heures de formation tous publics à l’intention de 15 à 20 000 personnes.»
« Et de nouveaux outils sont constamment mis en place pour attirer les entreprises étrangères, poursuit Marc Arno. Ainsi, début octobre, nous avons inauguré dans l’aéropole, avec l’Awex, l’Agence wallonne à l’Exportation et aux Investissements étrangers, un Welcome Office destiné spécialement aux entreprises établies en Europe et en Afrique du Nord, soit dans les deux parties du globe que dessert l’aéroport de Charleroi. Il s’agit d’un incubateur dans lequel les entreprises intéressées sont hébergées gratuitement pendant six mois, le temps de voir si la région peut constituer pour elles une bonne terre d’implantation. Notre intercommunale va prochainement inaugurer deux nouveaux parcs d’activités économiques mixtes de trente hectares chacun à Jumet. Il y aura donc de la place ! » ■
Dix-huit parcs gérés par IGRETEC
L’intercommunale gère aujourd’hui 18 parcs économiques sur une superficie de 800 hectares dans la région de Charleroi et dans le Sud Hainaut. Au total, cela représente environ 600 entreprises et quelque 20 000 emplois.
Quatre de ces parcs sont situés sur le territoire de Charleroi : l’aéropole (180 entreprises), les parcs d’activités économiques de Charleroi-Gosselies 1 (11 entreprises, dont Caterpillar et ses 4 700 emplois) et Charleroi-Gosselies 2 (13 entreprises, dont la Sonaca – 1 600 emplois) et celui de Charleroi- Jumet (69 entreprises). Parmi les autres grosses pointures implantées dans ces parcs : AMI Metals, Johnson & Johnson, AGC (ex-Glaverbel), Getaway… Le rôle du département animation économique d’IGRETE C est d’aider ces entreprises dans leurs démarches et projets de développement. Une cellule de conseillers est ainsi spécialement chargée de les accompagner dans la rédaction de leurs dossiers de demandes d’aides financières (à l’investissement, à l’emploi, à l’innovation, aux aides fiscales, etc.).
Import-export
L’Agence wallonne à l’Exportation et aux Investissements étrangers joue également un rôle très important dans le développement de l’aéropole. L’une de ses missions est précisément de promouvoir les investissements étrangers.
Dans ce cadre, elle prospecte auprès des entreprises susceptibles d’être intéressées à développer une activité commerciale ou industrielle en Wallonie. Après avoir identifié un investisseur potentiel, l’AWEX veille à recourir à la collaboration de tout organisme public ou privé, européen, fédéral ou régional, dont l’intervention pourrait décider l’investisseur potentiel à faire le choix de la Région comme lieu d’implantation. C’est encore elle, ensuite, qui propose les divers sites d’implantation possibles en collaboration avec les intercommunales de développement économique ou les agences immobilières. Elle participe également à l’élaboration d’un dossier d’incitants financiers européens et régionaux, à la mise au point avec les services fédéraux concernés des aspects fiscaux et sociaux, et à la mise en relation avec des partenaires financiers.
Informations :
Boulevard Pierre Mayence, 16000 Charleroi
Tel. : +32 (0)71 202 811
www.igretec.com