- Dossier
Par Christian Sonon
Un film ne doit pas jouer sa carrière sur un coup de dé. Une sortie, cela se prépare longtemps à l’avance. Et avec méthode. Philippe Kauffmann et ses associés au sein de Cuistax l’ont bien compris : ils proposent des opérations marketing originales auprès d’un public bien ciblé.
Parce qu’ils ont tous les trois une belle expérience dans le métier – Philippe Kauffmann (La Parti Production) et Joseph Rouschop (Tarantula) sont producteurs et Marco Calant gère une société de communication (Tramway 21) –, ils sont bien placés pour savoir quels efforts gigantesques sont nécessaires pour donner naissance à un film mais aussi qu’il est très facile de mettre un terme à sa carrière dès la première semaine d’exploitation parce qu’il ne fait pas assez d’entrées.
Aussi, nos trois gaillards ont-ils décidé d’ouvrir une nouvelle route et d’aller à la rencontre des spectateurs afin de leur faire découvrir les films bien avant leur sortie. Début 2012, ils ont créé Cuistax, une société de marketing pour le moins originale avec laquelle ils pédalent pour faire avancer le cinéma belge d’auteur. Avec une énergie telle que s’ils accrochaient une dynamo à leurs roues, ils arriveraient à faire briller la petite flamme dans l’oeil de nombreux spectateurs et peut-être même à rallumer des salles entières !
« Il faut commencer la promo bien avant que le film soit terminé et, si possible, avant même que le tournage ait commencé !, martèle Philippe Kauffmann, qui est à l’origine de l’entreprise. Et chaque stratégie de communication doit être unique et adaptée au produit. La première question c’est : “À qui ce film s’adressera-t-il ?” Puis, “Comment faire pour que les gens aillent le voir ?” » Et le Gaumais d’origine, ancien directeur artistique des Halles de Schaerbeeck – la hantise des salles vides, il connaît ! – d’expliquer comment lui et ses associés s’y sont pris pour faire connaître Mobile Home, le premier long métrage de François Pirot : « Puisque le film s’adressait aux jeunes, nous sommes allés à leur rencontre. Durant l’été 2012, nous avons baladé le camping-car équipé d’un “mobilhomaton” dans tous les festivals musicaux. Les spectateurs venaient s’y faire photographier puis allaient voir leur photo sur le site du film. Résultat : dès sa sortie, les gens se sont précipités dans les salles ! »
D’autres exemples ? Pour Ernest et Célestine, Cuistax s’est adressé directement aux plus jeunes en créant, avec des professionnels du crossmedia, des applications pour tablettes. Pour Je suis supporter du Standard, la société a monté des opérations avec le club liégeois : dossier de presse réalisé sous forme d’album Panini par la maison d’édition en Italie, conférence de presse dans le car des joueurs, diffusion de la bande-annonce dans le stade lors du match de play-off Standard-Anderlecht… « Et, chaque jour, sur son iPhone, le réalisateur Riton Liebman a écrit le journal du tournage sous forme de capsules humoristiques que Le Soir, en tant que partenaire, a diffusé sur son site », explique Philippe Kauffmann, qui insiste sur la nécessité de travailler par « coup de coeur » et à la demande des producteurs pour lesquels ces actions remplaceraient les campagnes de pub classique. « Est-il encore nécessaire de faire des affiches ? Est-ce qu’il faut continuer à suivre le circuit traditionnel : salles de cinéma, DVD, télévision ? Est-ce que la première d’un film doit absolument avoir lieu dans les salles ? », s’interroge même celui qui se sent de moins en moins l’âme d’un producteur compte tenu des difficultés inhérentes au métier. « Ainsi, pour “Kill me please”, d’Olias Barco, nous avons offert à 1 000 internautes l’occasion de voir le film sur son site, à minuit, la veille de sa sortie. Certains exploitants de salles nous en ont voulu, pensant qu’on leur avait piqué des spectateurs. Ils n’avaient rien compris : ceux qui ont vu le film sur leur ordinateur en ont parlé à leurs copains qui sont allés le voir au cinéma. C’est du marketing ! »
Renseignements
Cuistax sprl
Rue Auguste Donnay, 99
B-4000 Liège