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Par Carole Depasse
En cours de rénovation, le « campus hôtelier » de Namur ne recule pas devant les moyens. Il met à la disposition de ses élèves une école d’application unique en son genre : un hôtel de prestige et un restaurant gastronomique.
Le 8 juillet 1891, le roi Léopold II signe l’arrêt de déclassement de la Citadelle comme place forte et la remet officiellement à la Ville de Namur. Ayant perdu tout intérêt stratégique, la Citadelle (à l’exception de la Médiane et de Terra nova) est démilitarisée. Le roi entrevoit déjà le potentiel touristique de ce site historique. En 1893, un entrepreneur bruxellois propose que soient aménagés un hôtel avec établissement hydrothérapique et des jardins. Un funiculaire puis un tramway complètent le projet de manière à relier l’hôtel, d’une part, au bas des fortifications (côté Meuse) et, la gare de Namur, d’autre part. À charge de la ville de construire les routes carrossables (Merveilleuse et des Panoramas), escaladant chacune un versant de la colline. Une société anonyme voit le jour, Namur Citadelle, chargée de l’exécution des travaux et de la gérance du complexe touristique. Le 21 mai 1899, le Grand Hôtel de la Citadelle est inauguré alors qu’il est toujours inachevé. Le guide du Touriste et du Cycliste de l’époque écrit : « C’est dans les hauteurs de la Citadelle qu’on trouvera une habitation confortable exempte d’un luxe qui coûte cher sans rien donner, avec des eaux froides et des eux chaudes à chaque étage et constamment des ascenseurs… ». Cependant, l’argent vient à manquer et l’exploitant, dans une situation précaire, propose la reprise de la concession par la Ville. L’acte de vente est signé le 8 juillet 1911. L’hôtel est modernisé et ouvre à nouveau ses portes le 8 avril 1914. Une année qui sonne comme un glas. Le 23 août, le Grand Hôtel est bombardé. Il va se consumer deux jours durant. C’en est fini de l’hôtel pionnier à l’assaut de la Citadelle.
Campus hôtelier
Il faut attendre l’année 1930 pour que de nouveaux travaux sur l’emplacement de l’hôtel détruit débutent : le chantier du futur Château de Namur est mis en route. Devenu hôtel « Amigo », le propriétaire, bridé dans ses projets d’expansion en raison de l’architecture du bâtiment (un espace colossal sous toit inutilisable), propose à l’École Hôtelière, située quelques mètres plus bas, d’en assurer la gestion. C’est une opportunité, d’une part, pour l’école de s’adjoindre un hôtel-restaurant d’application de prestige et, d'autre part, pour la Ville de Namur de céder à la Province (bail emphytéotique) un bien qui lui coûte cher. Ainsi, depuis 1978, au sommet de la Citadelle, se développe un « Campus hôtel ier » unique en Communauté française : une école secondaire professionnelle, une Haute École en gestion hôtelière (Baccalauréat) et une école d’application qui n’est autre qu’une maison de stage. Il n’existe pas encore de Master, mais un projet est en cours de réflexion. « Un campus hôtelier aussi complet que le nôtre, cela n’existe pas ailleurs », précise, avec un subtil mélange d’humilité et de fierté, Cédric Vandervaeren, directeur du Château de Namur, professeur en management hôtelier en Baccalauréat et ex-élève du campus. Comme le furent aussi Pierre Résimont de L’Eau vive à Arbre ou encore Lionel Rigolet et Laurence Wynants du Comme chez soi à Bruxelles. Des références. Tous les diplômés ont obligatoirement suivi un stage au Château de Namur au cours de leur formation. Là, les professionnels de l’Horeca ont une approche pédagogique qui leur permet de former les stagiaires et de les évaluer de manière cohérente et optimisée. « Au Château, nous apprenons aux étudiants à se frotter au métier. Il faut savoir que, dans la restauration, beaucoup de diplômés quittent le métier dans la première année de leur vie professionnelle. Le choc est trop grand. Une école d’application est là pour éviter cela. » Autre atout de l’école d’application : la rencontre avec une clientèle réelle. « Le Château de Namur n’est pas le restaurant de l’école. C’est un vrai hôtel quatre étoiles avec un restaurant gastronomique. Nous ne pouvons pas nous permettre des dérapages ou de servir quelque chose de mal préparé. » Le message semble passer si l’on en juge l’application des jeunes gens en blouse blanche et noeud papillon noir. Le maître d’hôtel n’est jamais loin et veille discrètement.
Pour tester son courage
Durant le cursus du Baccalauréat, la formation technique est centrale. Les méthodes de gestion d’entreprise, le marketing, la gestion financière et l’apprentissage des logiciels informatiques spécifiquement hôteliers constituent un axe majeur de la formation. Le management des ressources humaines et l’apprentissage des langues étrangères sont également au coeur du programme d’études, tant la profession est un métier où le service et les contacts humains sont prioritaires. « Je pousse les étudiants à être créatifs. Le Château possède des caves inutilisées que je souhaitais rentabiliser sans faire de frais. Pendant les cours, nous avons réfléchi et trouvé ensemble une solution gagnante : monter un deal avec une entreprise bruxelloise spécialisée dans le team building pour l’installation d’une infrastructure de type Fort Boyard appelée Fort Bayard (Namur oblige). » Tout y est : tyrolienne, maîtres de jeux, toiles d’araignées et fumée anxiogène ! Depuis l’ouverture, l’attraction cartonne ! Comme une idée géniale a une vie courte, le professeur et ses élèves sont déjà en train de se creuser les méninges pour la suite. « Une Haute École qui n’a pas un outil comme le nôtre, je me demande comment elle fonctionne pour toucher à la réalité du métier si ce n’est dans les livres ? » Bonne question.
Renseignements :
Château de Namur
Avenue de l’Ermitage 1
B-5000 Namur
Tel +32 (0)81 72 99 00
gm@chateaudenamur.com www.chateaudenamur.com