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© Malmedy

Le temps des carnavals

  • Patrimoine
  • / Folklore
Wallonie

Par Jean-Pierre Ducastelle

En Wallonie, on a le culte de la fête. Si on s’y débride avec générosité, on aime néanmoins que ces réjouissances soient ancrées dans notre histoire. À l’approche du printemps, les carnavals sont sans doute les plus beaux exemples de ces festivités de tradition. À tel point qu’elles appartiennent désormais à ce qu’on a appelé le « patrimoine immatériel ». Excusez du peu !

Au cours des années 1970, l’importance du patrimoine culturel est mise en évidence par l’Unesco. L’Organisation des Nations Unies pour la Science, la Culture et le Patrimoine élabore une Convention internationale sur le Patrimoine Mondial en 1972. Ainsi, les monuments d’importance majeure et les sites naturels remarquables sont considérés non seulement comme des biens nationaux, mais aussi comme faisant partie de l’héritage culturel de l’humanité, appartenant donc sur un plan idéal à l’humanité tout entière (ndlr : ne citons que l’exemple du Temple d’Abou Simbel en Egypte)

La notion de patrimoine sera élargie aux traditions populaires affirmant l’identité des communautés ou des groupes. Traduisant ce nouvel état d’esprit, une Convention est votée par l’Unesco le 17 octobre 2003 pour la Sauvegarde du Patrimoine culturel immatériel*. Les expressions du patrimoine oral et immatériel sont donc diversifiées et souvent font partie de vastes complexes de traditions, croyances et pratiques séculaires qui constituent l’art et la culture populaires. Venues du passé, elles vivent, évoluent, changent dans le présent sous l’impulsion de toute une série de facteurs socioculturels. Le patrimoine immatériel, ce sont donc les traditions vivantes qui représentent une partie majeure de l’identité des groupes humains qui les pratiquent.

(*)L’article 2 de ce document précise : « On entend par “patrimoine culturel immatériel” les pratiques, représentations, expressions, connaissances et savoir-faire – ainsi que les instruments, objets, artefacts et espaces culturels qui leur sont associés - que les communautés, les groupes et, le cas échéant, les individus reconnaissent comme faisant partie de leur patrimoine culturel. Ce patrimoine culturel immatériel, transmis de génération en génération, est recréé en permanence par les communautés et groupes en fonction de leur milieu, de leur interaction avec la nature et de leur histoire, et leur procure un sentiment d’identité et de continuité, contribuant ainsi à promouvoir le respect de la diversité culturelle et la créativité humaine.»

Traditions vivantes

La Belgique francophone est terre de nombreuses traditions populaires. Elle est profondément attachée aux richesses multiformes de son folklore qu’elle exprime selon ses régions et la sensibilité des habitants, par ses carnavals, ses marches, ses processions, ses cortèges, ses ducasses, ses sorties de géants, ses jeux, ses repas, les mille et une occasions qui émaillent le calendrier. Elle y puise une part essentielle de son identité. Toutefois, si toutes les saisons sont propices à la fête, en Wallonie, la fin de l’hiver et le début du printemps ont toujours privilégié le carnaval.

Le temps des carnavals

Tel qu’il a survécu dans diverses localités de Wallonie, le carnaval est le prolongement direct de l’ancienne mascarade hivernale. Il est cristallisé autour de quelques dates-clés toutes mobiles puisque liées, tels les Jours Gras, au Mercredi des Cendres, au carême et à la fête de Pâques qui commande toutes les autres fêtes mobiles. La célébration du carnaval est donc restée liée à ce calendrier. Les Jours Gras marquent l’apogée des carnavals les plus traditionnels : Binche et Malmedy.

Les anciens carnavals de la Région du Centre (Hainaut) comme Haine-St-Pierre et Morlanwelz ont lieu le dimanche de la Quadragésime ou Feureu. Plus récemment, la célébration de certains carnavals a été fixée ou déplacée au quatrième dimanche de carême ou Laetare. C’est le cas du carnaval des Blancs-Moussîs à Stavelot, de la sortie des Chinels à Fosses, du carnaval des Porais à Tilff ou encore de plusieurs carnavals de la Région du Centre, La Louvière en particulier. Au terme du carnaval, on a coutume, à Malmedy, de brûler la Haguette. Cette tradition d’allumer un feu pour marquer la fin de la fête ou encore comme raison d’être de la fête, se retrouve un peu partout à travers le temps. Ce Feureu comme on l’appelle dans la Région du Centre, coïncide avec le dimanche des Brandons (Quadragésime). En Wallonie, la tradition des Grands Feux est restée fort vivante dans les provinces de Liège, de Luxembourg et de Namur.

À Treignes près de Couvin, un mannequin, fait de fagots, est promené par le village, avant d’être jugé sur le parvis de l’église ; la damnation à la noyade, puis au brûlage s’accompagne de nombreux traits satiriques décochés au voisinage. Au terme du parcours, le feu est bouté au bûcher. La foule crie et danse autour de l’immense tas de bois enflammé. À Treignes, la coutume veut que l’on profite de ce moment pour « réchauffer les femmes pour un an » en les approchant du foyer. Voilà qui promet !

 

Les mots du Carnaval

 

Carême (ou quaresme)

Période de 46 jours pendant laquelle les chrétiens vont se priver de nourriture pour se purifier avant la fête de Pâques. Ces restrictions s’étendent sur six semaines mais elles sont levées les dimanches. C’est pourquoi s’ajoutent les quatre jours à partir du Mercredi des Cendres. Le mot vient du latin populaire quaresima altération du latin classique quadragesima, le quarantième jour avant Pâques. Cette période ferait aussi allusion aux quarante jours passés par le Christ dans le désert.

Carême-prenant ou Carême-entrant

Les deux mots sont employés dans certaines régions de France pour évoquer le carnaval.

Caresmiaux ou Caresmel ou Cwarmê

Anciennes dénominations du carnaval en Wallonie. Elles viennent directement du mot carême. Le troisième mot est toujours en usage à Malmedy.

Carnage ou Charnage 

Désignation ancienne du carnaval, période où l’on peut consommer beaucoup de viande.

Carnaval

C’est le mot le plus répandu aujourd’hui pour les réjouissances qui marquent la fin de l’hiver et s’inscrivent dans le calendrier chrétien avant le carême. Il est emprunté à l’italien carnevalo qui vient du latin carne levare, ôter la viande. Le mot indique donc l’entrée en carême puis la veille de l’entrée en carême et, par extension, les Jours Gras et l’ensemble de la fête.

Fastnacht ou Fastenavond

Mot allemand désignant le carnaval, par exemple en Communauté germanophone en Wallonie. Il désigne la veille du jeûne (la nuit ou le soir), donc des privations du carême.

Laetare

Terme latin prononcé par le prêtre dans l’introit de la messe de la mi-carême, le quatrième dimanche du carême. C’est un moment de répit qui permet de faire, la fête. Le mot signifie d’ailleurs « réjouissez-vous ! » le carnaval est célébré à cette date, dans plusieurs villes wallonnes, comme Stavelot, La Louvière ou Tournai.

Quadragésime

Désigne le quarantième jour avant Pâques. C’est le premier dimanche de carême.

Quaresmiaux ou Quaresmel

(voir caresmiaux et caresmel)

Quinquagésime

Cinquantième jours avant Pâques. C’est le Dimanche Gras où se déroulent de nombreuses festivités du carnaval.

Rosenmontag

Lundi des Roses, célébré à Eupen le Lundi Gras. Le mot serait une déformation de Rosensonntag qui désigne le Laetare à Cologne.

Vastenavond

Souvent déformé en Vastelavond ou Vastavond. Il désigne le carnaval en Flandre. On se reportera au germanique Fastnacht ou Fastenavond. 

 

LISTE, ÉTABLIE PAR LA COMMUNAUTÉ FRANÇAISE, DES CHEFS-D’OEUVRE DU PATRIMOINE ORAL ET IMMATÉRIEL :

➝ La Ducasse de Mons.➝ La Ducasse d’Ath. ➝ Le Meyboom de Bruxelles. ➝ Le Carnaval de Binche. ➝ Le Carnaval de Malmedy. ➝ La Marche St-Feuillien de Fosses-La-Ville. ➝ La Marche Sainte-Rolende de Gerpinnes. ➝ La Marche de la Trinité à Walcourt. ➝ La Marche St-Roch d’Ham-sur-Heure. ➝ La Marche St-Roch à Thuin. ➝ La Marche de la Madeleine à Jumet. ➝ Le Tour Sainte-Gertrude à Nivelles. ➝ Le Tour Sainte-Renelde à Rebecq (Saintes). ➝ Les Echasseurs de Namur. ➝ La Société royale Moncrabeau de Namur. ➝ La Compagnie royale des Anciens Arbalétriers de Visé. ➝ La Compagnie royale des Anciens Arquebusiers de Visé. ➝ La Compagnie royale des Francs Arquebusiers de Visé. ➝ La Fauconnerie. ➝ La Ducasse de Messines à Mons.

 

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