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© Sébastien Lambotte

Virginie Harzé
La gardienne
des bières de Val-Dieu

  • Patrimoine
  • / Tourisme culturel
Liège  / Aubel

Par Sébastien Lambotte

Virginie Harzé est responsable de production à la brasserie de l’abbaye Notre-Dame du Val-Dieu, au coeur du Pays de Herve. Cette jeune femme de 33 ans, agronome de formation, met toute sa passion au service de ces bières de qualité.

L’abbaye Notre-Dame du Val-Dieu cache bien des trésors. Parmi eux, les bières produites au coeur de sa brasserie. Leur gardienne, aujourd’hui, est Virginie Harzé. Au qualificatif de maître-brasseur, cette passionnée préfère la qualité de « responsable de production ». Avec dynamisme et vigueur, elle veille attentivement à la production de ces bières de qualité et au respect de leurs recettes qui, depuis quelques années, séduisent un nombre grandissant de consommateurs.

La maîtrise des éléments

Le processus de fabrication des bières de Val- Dieu, qu’il s’agisse de celui de la Blonde, de la Brune, de la Triple ou encore de la Grand- Cru, sans oublier la bière de Noël, n’a plus de secret pour elle. Un jour hivernal de brassage, en route depuis six heures du matin, elle s’active ci et là, entre les hommes de la brasserie, pour s’assurer que tout fonctionne correctement. C’est qu’il faut veiller au grain. De l’empâtage au brassage jusqu’à la mise en bouteille ou en fût, il faut que tout le processus reste sous contrôle. « La fabrication de la bière est réalisée sur base d’une recette. Chaque bière a la sienne et il convient de la respecter, explique-t-elle. Mais la bière est un produit vivant. De nombreux facteurs et éléments interviennent au cours de sa fabrication. Et il y a toujours bien quelque chose qui peut altérer sa qualité ou modifier son goût. Il faut jongler entre les ingrédients de base que sont le malt, le houblon, l’eau et les levures, puis veiller au suivi des différentes phases de production, comme les paliers de température au moment du brassage ou à la juste fermentation de la bière en cuve de garde… » S’il n’est pas forcément difficile de faire de la bière, c’est une autre histoire lorsqu’il s’agit de produire la même bière d’un brassin à l’autre. Tous les maître-brasseurs le confirmeront. « L’enjeu est d’améliorer la qualité de la bière en permanence, sans en altérer le goût ou la couleur, poursuit Virgine Harzé. C’est cela qui rend ce métier passionnant. »

La bière plutôt que le chocolat

Il y a maintenant huit ans que cette dynamique personne est arrivée à la brasserie de Val-Dieu. Agronome de formation, elle nourrissait dès ces études l’envie de travailler dans le secteur agroalimentaire. « À vrai dire, j’hésitais entre la bière et le chocolat. Au moment de faire un choix de stage lors de ma dernière année d’étude, considérant que je connaissais déjà bien assez l’univers du chocolat, j’ai opté pour le secteur brassicole », explique-t-elle. C’est à ce moment que Virgine est « tombée dedans ». « J’ai été fascinée par le produit, la complexité du procédé, le nombre de facteurs à prendre en considération pour réaliser une bonne bière. J’ai découvert un produit exceptionnel. Pour tout avouer, avant de découvrir l’univers brassicole, je ne buvais pour ainsi dire pas de bière. J’ai découvert le produit en même temps qu’un univers chaleureux et convivial. Je vous rassure, depuis lors, j’ai eu l’occasion de rattraper mon retard », explique-t-elle.

« J’ai été fascinée par le produit, la complexité du procédé, le nombre de facteurs à prendre en considération pour réaliser une bonne bière. J’ai découvert un produit exceptionnel. »


À l’issue de ses études, Virginie a d’abord trouvé un emploi dans une entreprise bien éloignée du secteur brassicole. Elle y est rapidement revenue, devenant laborantine en charge du contrôle qualité de la bière pour le compte d’une très grosse brasserie belge. « C’était bien différent de ce que je vis ici, au sein d’une petite brasserie. Chez mon employeur précédent, on travaillait à grande échelle. Alors qu’à la brasserie de Val-Dieu, il y a une vraie richesse à toucher à tout et à travailler sur l’ensemble du processus de production », explique la jeune femme.

Entente et entraide

C’est un brin de chance qui l’a amenée à Val- Dieu, dans cette abbaye cistercienne fondée en 1216. Souhaitant se rapprocher de sa campagne natale, la jeune femme a envoyé une candidature spontanée aux dirigeants de cette petite brasserie. « Je suis tombée au bon endroit au bon moment puisque, alors, ils cherchaient quelqu’un pour assurer le suivi du contrôle qualité et pour travailler au brassage des bières », poursuit-elle. C’était il y a huit ans. Pendant plusieurs années, elle a complété ses connaissances en travaillant avec les deux associés de la brasserie, Alain Pinckaers, à l’époque plus actif au niveau du développement commercial, et Benoît Humblet, ingénieur agronome qui a mis au point les différentes recettes des bières produites à Val-Dieu. « J’ai donc eu l’occasion de sortir du laboratoire pour me plonger dans le processus de fabrication de la bière et ainsi voir comment la qualité pouvait en être améliorée. Progressivement, j’ai appris énormément sur la production de la bière en mettant la main à la pâte. J’ai pu assouvir cette envie en arrivant ici. Même si, je le reconnais volontiers, j’ai souvent l’impression d’avoir encore beaucoup à apprendre », confie-t-elle. Elle a aussi pu découvrir le secteur et l’ambiance qui y règne. « Si la concurrence est réelle, vu le nombre de producteurs de bières qui se côtoient en Belgique, il y a une ambiance conviviale. J’ai été bien accueillie et l’on m’a toujours soutenue ».

Par ailleurs, si le secteur brassicole est un monde principalement masculin, elle y a facilement trouvé une place. C’est toujours avec plaisir, aujourd’hui, qu’elle savoure de bonnes « spéciales », toujours, avec ses confrères en échangeant quelques conseils pour parfaire les bières ou leur processus de production. « Il y a une réelle entente cordiale entre les acteurs, une entraide qui fait chaud au coeur. Et si, quand j’ai commencé, il s’agissait avant tout d’un milieu d’hommes, je me rends compte qu’il attire de plus en plus de femmes. »

Il y a deux ans, suite au départ de Benoît Humblet, parti de la brasserie de l’abbaye de Val-Dieu pour créer d’autres bières du côté de Gembloux, c’est à Virginie que l’on a confié la responsabilité de la production. De l’équipe, en dehors d’Alain Pinckaers, qui s’est aussi plus impliqué dans la production, l’actuelle responsable de production est celle qui a le plus d’expérience. Aujourd’hui, elle l’a partage avec le nouvel associé de la brasserie, Michaël Peisser, neveu d’Alain Pinckaers, ainsi qu’avec deux personnes qui la soutiennent au niveau de la production. Son travail a par ailleurs évolué. Les objectifs de la brasserie aussi. « Les défis sont nombreux. Il faut former le nouveau personnel, nourrir sans cesse la vertu de la bière grâce à un suivi au niveau du laboratoire, brasser effectivement et trouver les solutions pour répondre à cette volonté de doubler la production à moyen terme. C’est beaucoup de choses à la fois, mais c’est aussi ce qui rend mon métier exaltant. »

Restera à créer

Aujourd’hui, la brasserie de l’abbaye de Val- Dieu produit 7 500 hectolitres de bière par an. Tour à tour sont brassées la Blonde (qui présente un taux d’alcool de 6 %), la Brune (8 %), la Triple (9 %) et la Grand-Cru (10,5 %). Mais aussi, en saison, la Val-Dieu de Noël ainsi qu’une série de bières « à façon » représentant 10 % de la production. À l’horizon 2015-2016, la production devrait atteindre 15 000 hectolitres. Cette hausse de production ne se fera pas sans incidence sur le processus de fabrication qu’il faudra améliorer et élargir en veillant à ne pas altérer la qualité des bières. L’équipe, aujourd’hui composée de cinq personnes, devrait aussi s’élargir. Les défis sont donc considérables. Mais Virginie Harzé et ses comparses sont prêts à les relever avec enthousiasme.

Restera à la responsable de production, un jour, à créer sa propre recette et à la produire. Jusqu’alors, Virginie Harzé met en oeuvre les recettes de Benoît Humblet. La production d’une bière créée par ses propres soins sera donc l’étape suivante. « L’envie est là, même si je n’en fais pas une priorité. C’est une tout autre expérience pour moi. Je dois tout apprendre en la matière », explique-telle. Les festivités liées au 800e anniversaire de l’abbaye (en 2016) seront sans doute une occasion unique pour créer cette première bière. « Des réflexions sont menées actuellement. J’expérimenterais bien, pour l’occasion, la création d’une bière bio. Mais je ne suis pas la seule à décider. Nous verrons donc bien ce qu’il est possible de faire. » Ce qui sortira des cuves de brassage et qui se laissera savourer une fois fermenté en bouteille reste donc une surprise. Mais, sans aucun doute, cette bière reflétera l’expérience que Virginie Harzé a pu acquérir en huit ans. Elle ajoutera dès lors un trésor de plus à ceux que recèle l’abbaye de Val-Dieu. Des trésors que l’abbaye, cependant, aime partager et faire découvrir, pour que chacun prenne plaisir à les savourer.

 

Un ensemble majestueux

L’abbaye de Val-Dieu date de 1216 et est riche d’histoire. En son temps, haut-lieu du patrimoine du Pays de Herve, il a accueilli une communauté monastique cistercienne. La plupart des bâtiments que l’on connaît actuellement ont dû être réédifiés, suite à un pillage des troupes calvinistes en 1574. L’abbatiale, elle même, s’est partiellement effondrée en 1839 ! Le chantier de sa reconstruction s’est achevé seulement en 1884. Ensemble majestueux, cette église conserve de magnifiques stalles de la Renaissance en provenance d’une autre abbaye cistercienne liégeoise, la Paix-Dieu à Amay.

En 2001, les trois derniers moines cisterciens quittent l’abbaye et une communauté de laïcs investit le site afin d’y perpétuer les valeurs de la vie chrétienne suivant les principes de l’ordre cistercien. L’abbaye, comme la brasserie, peuvent être visités sur rendez-vous. Au coeur du Moulin du Val-Dieu, en face de l’abbaye, la restauration du terroir est mise à l’honneur depuis janvier 2013 afin de régaler les touristes belges et étrangers. En effet, le nom de Val-Dieu s’apprécie au-delà de nos frontières, notamment grâce à sa bière. 30 % de la production de la brasserie part à l’exportation dans 17 pays tels que les États-Unis, l’Italie, la France, les Pays-Bas, l’Espagne, la Chine, l’Ukraine, Suisse, Angleterre, le Canada, la Pologne…

 

Renseignements

Abbaye du Val Dieu
Val-Dieu, 227
B-4880 Aubel
abbaye@val-dieu.net
www.abbaye-du-val-dieu.be

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