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S’évader à vélo

  • Tourisme
Hainaut  / La Louvière

 

Si le vélo est le complément idéal des transports en commun et que de bonnes infrastructures cyclables augmentent le nombre d’usagers cyclistes en ville, le vélo est aussi un super moyen pour aller à la découverte de sa région et de ses habitants… et aller plus loin encore ! S’évader en Belgique, c’est la bonne idée pour concilier besoin de vacances et pratique du sport, pour préserver sa santé ou changer d’air tout simplement.

Avec deux experts du vélo, Pierre Pauquay et Olivier Béart, l’éditeur Olivier Weyrich a conçu un premier mook « 10-Découvertes » pour partir à l’aventure à travers notre beau pays. Avec eux, il a sélectionné dix destinations accessibles à tous, en vélo ou e-bike. Chaque destination s’accompagne d’une carte (aussi téléchargeable sur www.10-decouvertes.be) et d’un guide-découverte pour s’évader en toute tranquillité. Un premier numéro bourré de conseils pratiques et de suggestions à l’attention des débutants comme des habitués du vélo.

En partenariat avec l’éditeur, le WAW propose aujourd’hui à ses lecteurs une première balade à La Louvière, sur les traces du Patrimoine mondial de l’Unesco.

« Le vélo est Histoire quand il part sur les traces d’un Vincent Van Gogh dans le Borinage ou quand il rejoint les grands sites de l’Unesco de notre jolie Belgique. Le vélo est Nature quand il entre dans la grande forêt de Saint-Hubert, longe la Semois sauvage ou traverse les fagnes envoûtantes. Le vélo est Patrimoine quand il roule sur ses propres traces, sur ces routes de légendes que sont celles du Tour des Flandres ou de Liège-Bastogne-Liège, où tant de coureurs ont érigé leur propre gloire. Le vélo est à contre-courant de l’immédiat et de la rapidité de notre monde. À vélo, le temps est en rétropédalage. Le vélo impose un rythme où l’on peut enfin ouvrir les yeux sur les richesses de notre pays, le pays de la Petite Reine. »
Pierre Pauquay et Olivier Béart

 


Distance : 29,4 km
Points-nœuds 91, 27, 45, 34, 33, 30, 11, 5, 9, 17, 85, 91 

Une balade universelle

Le vélo est une merveilleuse machine à remonter le temps ! Il permet de découvrir en douceur des lieux imprégnés par une histoire émouvante. Partons de la ville de La Louvière à la découverte de deux sites remarquables, référencés au Patrimoine mondial de l’Unesco : le Canal du Centre historique et le site minier de Bois-du-Luc.


Bordant le canal, la Cantine des Italiens, lieu de départ de cette balade, pourrait se comparer à un camp d’internement, vu la disposition géométrique de ces baraquements. Après la Seconde Guerre mondiale, la Belgique est exsangue, le pays est à terre. La relance économique passera par le charbon. Le gouvernement Van Acker recrute une importante main-d’œuvre italienne qui sera parquée dans ces baraques. Dans les mines, les conditions de vie sont déplorables. Elles sont vétustes et dangereuses, les règles de sécurité négligées conduiront à la catastrophe du Bois-du-Cazier, le 8 août 1956.
Le site de la Cantine des Italiens abrite désormais un musée de l’immigration italienne ainsi qu’un restaurant.

Quatre monstres à la gueule d’acier

Nous voilà partis sur le RAVeL qui longe le canal et va nous emporter vers un beau voyage dans le temps. Première rencontre, peu après le départ, le village de Houdeng-Aimeries.

Le vendredi, c’est le jour du marché. Les échoppes aux mille couleurs se reflètent dans les eaux du canal et les produits italiens embaument l’air. Il bat ici un peu le cœur de l’Italie, comme à La Louvière, une ville qui renaît, qui devient belle, où l’on ressent la fierté de ces petits-fils d’immigrés. Dans les années cinquante, ils ont réussi, dans la souffrance, à offrir un avenir meilleur à leur famille.

Plus loin, nous croisons deux pilastres, témoins d’un pont de chemin de fer qui apportait le charbon provenant des mines, toutes proches. À la fin du XIXe siècle, les mines du Centre sont enclavées : il est difficile d’acheminer le minerai vers les grandes villes et le nord du pays. Le développement passera par la construction d’un canal afin de relier les bassins de l’Escaut et de la Meuse. Pour rattraper 66 mètres de dénivelé, quatre ascenseurs hydrauliques ont été nécessaires. Une prouesse technique qui est expliquée, à hauteur de l’ascenseur n°3, lors de la visite de la salle des machines reconnaissable par son bâtiment de style néogothique aux allures de château fort.

Le canal va alors devenir l’artère économique de la Wallonie. L’extraction du charbon grimpera en flèche. Des 500.000 tonnes extraites en 1832, on atteindra plus de 9 millions de tonnes en 1880. Le paysage sera bouleversé à jamais par ces quatre monstres à la gueule d’acier.


Bois-du-Luc. La maison du directeur est située dans l’axe de la grande rue.
Son balcon est en façade, pour un contrôle permanent de la cité.

La cité de Bois-du-Luc

Nous quittons le canal au pied de l’ascenseur n°3 pour nous diriger vers la cité minière de Bois-du-Luc (1). À l’approche du site, nous entrons dans un autre monde, comme si l’on nous ouvrait les portes d’un décor construit pour la gloire du capitalisme. Bois-du-Luc, c’est un microcosme en soi, isolé du monde, volontairement. Une histoire longue de 300 ans. Des générations entières d’ouvriers ont vécu ici, en totale autonomie : on naissait comme on mourait à Bois-du-Luc. Tout a été pensé, dessiné pour la productivité. En descendant à vélo la rue Quinconce, un voyage dans le temps s’ouvre à nous. Nous longeons d’abord l’hospice, l’hôpital, l’école pour filles, l’église, avant de rejoindre, en bas, le quartier des maisons ouvrières flanqué de son épicerie. On ressent la lourdeur historique de ces lieux, comme si le vélo nous permettait de nous immerger, de prendre le temps de les observer et de les ressentir. Le quartier ouvrier, avec ses maisons du XIXe siècle, toutes demeurées intactes, est disposé en un plan rigoureux de quadrilatères. De l’autre côté de la rue et si proche, l’entrée de la mine est protégée par deux tours de guet et par une porte-guillotine, digne d’une image du Moyen Âge, destinée empêcher les grévistes de rentrer dans l’enceinte.

Sur nos vélos, nous nous apercevons que l’architecture a dessiné un style de bâtiment pour chaque classe sociale. Elle exprime la hiérarchie, exacerbée. La maison du directeur est située dans l’axe de la grande rue. Elle est en hauteur, pour mieux asseoir son prestige, et le balcon est en façade, pour un contrôle permanent de la cité.

Se balader à Bois-du-Luc est un geste étonnamment moderne. La promenade pose beaucoup de questions sur le passé et sur l’avenir de notre société qui n’a pas hésité et n’a toujours pas de scrupules à envoyer des enfants dans la mine.


L’entrée de la mine est protégée par deux tours de guet et par une porte-guillotine, digne d’une image du Moyen Âge, destinée empêcher les grévistes de rentrer dans l’enceinte. 

L’ascenseur de Strépy-Thieu

Nous revoilà de retour au canal le long duquel nous continuons à nous laisser glisser tout en admirant les ouvrages d’art qui s’égrènent : ponts-tournants, ponts-levis et écluse. Nous sommes dans un livre d’histoire à cœur ouvert.

Après avoir dégringolé l’équivalent du dénivelé de l’ascenseur n°4, nous rejoignons le nouveau canal que nous longeons jusqu’à l’ascenseur funiculaire de Strépy-Thieu (2). Un ouvrage titanesque construit en vingt ans (1982-2002) et permettant aux péniches de grand gabarit de remonter (ou de descendre) un dénivelé de 73 mètres. La visite permet d’admirer l’impressionnante salle des machines. Au sommet de l’édifice, un superbe panorama offre une vue d’ensemble du site et complète la vision du film sur la construction et le fonctionnement de cet ascenseur qui fut le plus haut du monde jusqu’en 2016 et la construction de l’ascenseur des Trois Gorges, en Chine (113 mètres).

Le retour vers la Cantine des Italiens s’effectue dans les airs, en longeant un autre ouvrage impressionnant, le pont-canal du Sart, qui enjambe la vallée à Houdeng-Aimeries avant de rejoindre le canal historique.

A noter qu’il est très facile de ramener cette balade à une longueur de 17 kilomètres en évitant la traversée du site de Bois-du-Luc et en longeant continuellement les canaux.


L’ascenseur funiculaire de Strépy-Thieu.
Un ouvrage titanesque construit en vingt ans (1982-2002) et permettant aux péniches de grand gabarit de remonter (ou de descendre) un dénivelé de 73 mètres. 

(1) Voir WAW n°27, déc. 2014 (2) Voir WAW n°06, sept. 2009 

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