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Par Violaine Moers
UN CHEF TRÈS “NATURE” À FONTIN
Installé depuis l’été 2020 sur la place du Tilleul, toujours à Fontin, Stéphane Diffels a rénové une ancienne ferme dans un style contemporain et apaisant à la fois. Au centre, la cuisine du restaurant est ouverte sur la clientèle grâce à une vitrine intérieure. Portrait du chef atypique de L’Air de Rien.
© Anrtone Melis
Stéphane Diffels découvre sa passion sur le tard, après une carrière en supermarché. « J’ai seulement commencé la cuisine à 33 ans. Après mon premier jour de stage, j’ai eu le déclic, c’était fait pour moi ! Sans hésiter, j’ai ouvert mon propre restaurant dans la foulée. » Une énorme prise de risque donc pour le chef qui partait de rien. Embarquant aussi sa famille dans l’aventure, il fallait réussir, le droit à l’erreur n’était pas permis. Et, bonne nouvelle pour nos papilles, cela fait maintenant presque douze ans que cette belle expérience se poursuit. « J’ai tout appris ici tout seul, en essayant de faire de mon mieux. Cela dit avec le recul, je conseille quand même une année ou deux d’expérience, pour éviter les erreurs de débutant. Je pense que j’ai eu beaucoup de chance. »
L’année 2020 et le confinement ont tout de même été bénéfiques à Stéphane Diffels, qui a pu ouvrir L’Air de Rien dans son nouvel emplacement malgré le retard accumulé dans les travaux. Il s’agit d’une ferme rénovée avec des matériaux naturels de bois et d’argile, aux couleurs apaisantes et à l’ambiance chaleureuse. A la réouverture, en juin 2020, c’était la cohue, le restaurant a rencontré un grand succès pour les trois mois et demi d’ouverture du secteur. « Le confinement m’a fait un bien fou. Les travaux de la ferme prenaient du retard et nous commencions à tourner en rond dans la petite cuisine de l’ancien restaurant. Nous avions besoin de recul. Ça m’a permis d’arrêter de travailler, sans culpabiliser, et de recharger mes batteries pour m’impliquer pleinement dans mon nouveau projet . »
Ce déménagement lui offre aujourd’hui davantage de marge de manœuvre puisqu’il peut à présent exercer tout son talent dans une grande cuisine. Une terrasse verra prochainement le jour également.
L’appel de la nature et des produits locaux
Au début, c’était une carte classique qui était proposée, mais l’idée d’un menu unique pour décliner les produits locaux s’est très vite imposée. Aujourd’hui, il exerce une cuisine proche de la nature, dans une architecture composée de bois naturel et d’argile. « Une inspiration logique, cela s’est imposé à moi comme ce qu’il fallait faire ». Pour Stéphane, travailler les produits de saison, c’est la base. Il utilise la fermentation et essaie de trouver la technique ou la cuisson qui va mettre le produit en avant. Et cette volonté de travailler les produits locaux, c’est aussi pour se mettre des contraintes et se forcer à développer sa créativité.
Le menu est composé de beaucoup de services parce qu’il travaille peu de produits, mais sous des déclinaisons différentes. « Mon objectif c’est de faire voyager le client avec des produits de chez nous. Je propose une cuisine assez brute qui a l’air simple mais qui, au goût, va les surprendre avec des subtilités, des nuances, de la finesse. Grâce à la lumière qui illumine toute la cuisine, on suit les saisons en vrai, c’est super agréable. Ici, il n’y a aucune limite. Dans le jardin, nous avons planté des arbres, et dans la cour, des plantes aromatiques. On travaille les herbes sauvages d’ici. Cela ouvre de nouvelles façons de travailler. »
Autre nouveauté : la cuisine au feu de bois. Stéphane a installé un barbecue pour revenir aux bases, aux essentiels « parce qu’il n’y a rien de plus naturel comme style de cuisson ». C’est qui est de nouveau une contrainte, pour rester créatif. A travers ce type de choix, on ressent toute la passion du chef aussi bien pour la cuisine que pour sa région. « Je n’ai pas envie de montrer la technique, je veux montrer la beauté à l’état brut, être concis, ne pas trop en faire ». Cette façon de voir les choses est aussi valable pour l’atmosphère et l’accueil des clients. A L’Air de Rien, on se sent à l’aise. Quand on entre, on sent l’odeur de feu de bois, il y a un esprit chaleureux qui rappelle le feu de camp, la chaleur... On se dit qu’on va être bien reçu.
« J’ai tout appris ici tout seul, en essayant de faire de mon mieux. Cela dit avec le recul, je conseille quand même une année ou deux d’expérience, pour éviter les erreurs de débutant. Je pense que j’ai eu beaucoup de chance. »
© Anrtone Melis
Un esprit de famille
Si le métier n’est guère facile, il convient bien à Stéphane qui a une personnalité plutôt réservée, mais qui peut s’exprimer dans les heures plus tardives de la nuit. « Mon style c’est de travailler dans une ambiance familiale et conviviale. Chacun travaille comme si c’était pour lui. Je donne beaucoup de responsabilités, je délègue dans un esprit participatif. Je trace une voie, mais je laisse des libertés à chacun. Par exemple, quand je réfléchis à un nouveau plat, je le propose à l’équipe et chacun peut y réfléchir, s’exprimer, proposer des suggestions, etc. » Pour Stéphane, cet esprit permet à chacun de se sentir chez lui et d’être plus épanoui dans son travail.
Un style qui porte visiblement ses fruits puisqu’il n’y a pas beaucoup de roulement dans l’équipe de Stéphane, ce qui est très rare dans le secteur. Les quatre personnes qui travaillent à ses côtés, en cuisine ou en salle – dont Bertrand, qui est devenu son associé –, sont là depuis plusieurs années. « Je mets beaucoup d’énergie pour que l’équipe soit heureuse dans son travail et qu’il y ait une bonne dynamique. C’est très important pour moi. »
Coté 16/20 par le Gault & Millau
© Anrtone Melis
Au printemps dernier, durant le confinement, Stéphane Diffels avait organisé des formules “Menu à 4 mains” pour les repas à emporter. Si le “take away ” ne permet pas de faire la même cuisine que d’habitude ni d’avoir les mêmes revenus, ce fut néanmoins un expérience enrichissante. « Ce genre de service recrée une dynamique. On passe toute une semaine ensemble pour élaborer le menu, échanger et perfectionner les plats. On gagne moins d’argent, bien sûr, mais c’est plus agréable et cela permet de découvrir d’autres façons de travailler. »
L’année 2020 n’aura donc pas eu que de mauvais côté puisque c’est aussi l’année de la récompense avec la très belle cote attribuée par le guide Gault & Millau : 16/20.
« Je suis très content de cette récompense, bien sûr. Pour la suite, je serais déjà le plus heureux du monde si mon équipe et moi-même pouvons gagner notre vie, retrouver nos clients et renouer avec le succès que nous avons connu à l’ancienne adresse. Ce serait déjà la plus belle victoire. »
L’Air de Rien
Place du vieux Tilleul 14
B-4130 Fontin
+32 (0) 4 225 26 24